De nombreux artistes s’y sont confrontés avant eux (Siouxsie and the Banshees, Martin Gore, Johnny Cash, Bryan Ferry, Mark Eitzel…), l’album de reprises est bel et bien une figure imposée de la monde du rock. C’est pour tous un moment de récréation et de plaisir réalisé avec un soin particulier. Un disque qui permet de rendre hommage à d’autres artistes fondateurs, de faire connaître des groupes oubliés et de surprendre par des choix audacieux. Ce qui est totalement Nada Surf a toujours aimé reprendre les chansons des autres, que ce soit en live (Blue Monday) ou sur disque (Where’s my mind). On sent que le trio New Yorkais s’est plongé dans l’exercice avec délectation. Pour If I had a hi-fi, Nada Surf vous propose leur playlist idéale et dans celle-ci, on trouve des stars (Depeche Mode, Kate Bush), des groupes cultes (Moody Blues, Go Between, The Mice) ou oubliés (Dwight Twilley), des contemporains moins chanceux qu’eux (The Silly Pillaw), des artistes en devenir (The Soft Pack). On savait les Américains francophiles et ils reprennent donc Coralie Clément. On les découvre hispanophiles pour une reprise d’un titre des obscurs Espagnols de Mecromina. Par cette liste, tout est dit ou presque : Nada Surf est bel et bien un groupe éclairé, ouvert d’esprit qui regarde son passé mais aussi son présent (Bright side des Soft Pack date de 2009).
Ce qui fort – et qui est le privilège des plus grands – c’est qu’à partir d'une liste très hétérogène de covers, Nada Surf arrive toujours à y mettre sa patte, tout en gardant l’esprit des originaux. Les Américains gardent le gimmick de guitare au centre de Enjoy the Silence et change vire le reste au profit d’une power pop tendance West Coast. Ils restituent les différents mouvements de Question des Moody Blues mais durcissent le propos pour un résultat qui déménage. Love and Anger garde sa sensualité première mais Nada Surf apporte une émotion plus masculine à l’univers de poupée de Kate Bush. Love goes on des Go Betweens est aussi mélodique de l’original mais avec la Nada Surf touch, c’est-à-dire speedé et avec des guitares plus accrocheuses Après Let go, The Weight is a gift et Lucky, la machine Nada Surf est bien rodée et derrière l’énergie, on a désormais la certitude de trouver des idées d’arrangements ultra mélodiques d’un groupe sûr de son talent. De ce côté-là, c’est sans surprise (encore que les cordes en suspension sur Evolution de Mecromina pourront en surprendre plus d’un) mais qu’est-ce c’est bien. Un des meilleurs Nada Surf, sans doute et étonnamment, un album très personnel.