Cet album est une révélation. Oui, je vous l'avoue. Non pas une révélation musicale, une révélation personnelle. Grâce à cet album et au précédent du même artiste, Batterie faible, un dégout s’est conforté en moi. Il était déjà présent depuis l’apparition de l’auto-tune chez les rappeurs. Vous voyez de quoi je parle. Quand vous ajoutez à cela une musique à base de vocoder et le champ lexical d’un misogyne invétéré, vous obtenez la musique de Damso. Un rap censé être dur et cru, qui n’est que vulgarité. L’artiste belge transmet son aversion des femmes à travers des paroles teintes d’indifférence, à croire que ce dernier est totalement dénué d’étonnement. L’apathie du chanteur, si l’on peut encore le nommer ainsi, se lit également dans la construction de ses phrases, toujours avec des mots manquant et toujours dans un ordre inversé à l’instar de maître Yoda ; ce qui est sûrement voulu et ce qui forge le style et la prose de Damso.
Avec des textes pareils, ne nous étonnons plus de la complaisance des jeunes dans leurs communautés phallocratiques où règne l’adultère, la marchandisation du sexe et l’irrespect des règles de bienséance sociale.
Batterie faible avait au moins le mérite de contenir un titre autobiographique assez bien écrit, Graine de sablier. Dans Ipséité il est plus difficile de trouver un titre correct, si ce n’est le plus populaire, Macarena. L’ipséité désigne l’ensemble des paramètres spécifiques à une personne, le caractère. Une personnalité dont on a du mal à dessiner les contours vu ce qu’il laisse transparaître de lui-même, plus occupé à insulter les mères de ses compères. Il ne suffit pas d’emprunter les lettres de l’alphabet grec pour numéroter les titres de son album ou de lui donner un titre à consonance latine pour intellectualiser un contenu qui reste primaire. Cependant je le remercie, parce qu’à défaut d’avoir dépeint son ipse, il a redonné quelques certitudes à la mienne. Décidément, j’ai du mal avec le rap moderne. Signé le connard de puriste bloqué dans le passé.