J’arrive
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J’arrive

Album de Jacques Brel (1968)

La voix, les arrangements, les paroles, le personnage ou encore son attrait pour la mer, depuis que j'ai découvert Jacques Brel assez jeune, il ne m'a jamais laissé de marbres, bien au contraire, grandissant avec La Valse à mille temps, Bruxelles, Ces gens-là, Amsterdam ou encore Vesoul. Tant de titres et albums qui ne m'ont jamais lassé et, oscillant entre mélancolie, humour, portrait de la société et de l'humain, le grand Jacques a toujours su être d'une grande richesse et émotion. Une des plus belles voix et plus grands talents qu'il m'ait été donné d'écouter.


En exceptant quelques bandes-originales et des réenregistrements, J'arrive sera le dernier disque du grand Jacques pendant neuf ans avant son grand testament Les Marquises, enregistré alors que son cancer était déjà bien avancé. Si en général Brel ne manque pas forcément d'humour, ce disque-là est plus triste, voire même plombant où seul quelques rares moments de légèretés font surface, notamment le fabuleux Vesoul. Sur celle-ci, l'accordéon est remarquable (d'ailleurs Brel chante dans le refrain qu'il en a horreur !), tout comme les paroles qui sont absolument géniales, la façon de chanter rapidement et la mélodie, légère et en osmose totale avec les autres éléments. L'une des chansons de Brel qui m'a le plus marqué et une de mes préférés.


Pour retrouver quelques légèretés, il faut faire un bond vers la face B avec le tordant et un peu jazzy Comment tuer l'amant de sa femme quand on a été comme moi élevé dans la tradition où, sur une mélodie entrainante, il se demande comment il peut tuer celui qui va lui "poser des problèmes" alors qu'il a été élevé dans les bonnes traditions. La bière, qui clôt l'album, permet à Brel de finir sur une touche plus légère, voire amusante et fantaisiste avec une mélodie fort sympathique et des paroles évoquant la mousse "de Londres à Berlin". Des chansons plus légères mais qui montrent tout de même tout l'art de Brel pour toujours trouver le ton juste et des arrangements géniaux, que les chansons soient dans la gravité ou non.


Excepté ces trois titres, Brel se montre plus triste et mélancolique, sans pour autant tomber dans un excès de pathos et trouvant toujours le bon équilibre et une justesse dans les paroles et mélodies. Il ouvre l'album avec J'arrive et les mots "De chrysanthèmes en chrysanthèmes", posant déjà une ambiance assez lourde mais la chanson monte peu à peu en puissance et atteint toute sa grâce et son lyrisme une fois que le refrain arrive. C'est vraiment avec le mélancolique l'Ostendaise que Brel m'emmène dans son univers où il fait parler tout son lyrisme, tant dans les arrangements que les paroles et met en avant une femme attendant le retour de son mari, un marin, emmené par une magnifique et envoutante mélodie. On retrouve l'aspect nostalgique avec la clôture de la face A, Je suis un soir d'été, où il fait preuve de justesse et prolonge une ambiance désabusée en dressant des portraits des différentes couches de la société.


Toujours dans un ton mélancolique, Brel ouvre la face B avec Regarde Bien, Petit où, avec des paroles mystérieuses, il signe une magnifique mélodie. L'Eclusier et son magnifique accordéon continuent d'être dans un ton plus grave, il décrit la dure réalité de ce métier, confirmant à nouveau son attrait pour la mer, avec émotion et dureté ("Dans mon métier c'est en hiver qu'on pense au père qui s'est noyé"/"Dans mon métier c'est au printemps qu'on prend le temps de se noyer"). Un Enfant doit être la seule chanson de l'album qui me laisse un peu de marbres (toute proportion gardée) malgré de belles paroles mais un arrangement un peu trop chargé. Sans être mon album préféré du grand Jacques (la concurrence est tout de même très rude), J'arrive reste tout de même une très belle et mélancolique pépite et représente tout le talent de Brel, des paroles sachant être très graves et justes, ou au contraire légères et marrantes à souhait et en osmose avec des orchestrations brillantes et prenantes, sachant créer des ambiances bouleversantes ou légères mais toujours d'une grande richesse et émotion.


Brel avait déjà délaissé les prestations scéniques et il se consacrera par la suite au cinéma avant de se retirer aux îles Marquises pour y écrire, malade, son dernier disque. Ici, il se montre plutôt triste et mélancolique malgré quelques touches de légèretés et c'est avec talent, justesse, émotion, et parfois humour qu'il aborde l'humain, la mer, la société ou encore... la bière.

Docteur_Jivago
9
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Créée

le 18 août 2015

Critique lue 931 fois

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Docteur_Jivago

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