Biolay a déclaré un jour: "La Superbe a compté dans la décennie, je crois". Cela peut sembler un brin frimeur, pour certains. Mais je suis de son avis. La Superbe est le meilleur album français des années 2000. Purement et simplement. Biolay était déjà un chanteur hyper doué, il atteint là le summum. Il a fait ce monument presque tout seul, et réussit là un défi artistique incroyable: un hymne à la Solitude, sur toutes ses formes. Si si, si vous écoutez bien, c'est le sentiment prédominant tous les titres de ce double album qui passe comme pour un seul. Il s'implique personnellement, à fond, et il nous touche en plein cœur.
Rien que sa chanson d'ouverture, "La Superbe"... Une tornade d'émotions et d'images. Tant de sens sont possibles: parle-t-il d'un amour impossible, parle-t-il de la Mort, parle-t-il d'un Idéal, ou parle-t-il du sentiment solitaire pur ? Au final, c'est sans importance. On voyage dans une âme, carrément, avec cette chanson. Magnifique. "15 Aout" est atypique, très originale. Le thème instrumental est déchirant. Par contre, la voix de Donzelli ne me convient pas, perso, par dessus pour la lecture de la lettre... "Padam" balance du lourd, du très lourd ! J'attendais en vain, que le monde entier m'acclame, qu'il me déclare sa flamme, dans une orgie haut de gamme... "Miss Catastrophe" est terrible par son sujet. Il peut en plus interpeller notre vécu. L' intro est également unique (il dure deux minutes, et il évolue en deux parties qui durent donc exactement une minute chacune !). On se demande quand la qualité va baisser, et ben non il continue dans sa lancée, avec "Ton héritage". Arrangements sublimes (c'est d'ailleurs bizarre que personne n'y ait pensé avant), texte au style encore une fois unique, voix toujours aussi belle et intimiste. A noter que j'aime comment il parle de la mer. "Si tu suis mon regard" , presque un poème attribué à sa pochette impeccable, a de nouveau un rythme d'enfer. Transition avec une alarme, "Night Shop". La ballade amoureuse du double-disque. Et encore une fois un bouleversement émotionnel. Même si, pour le coup, les paroles baissent d'un cran... D'ailleurs, on a enfin un baisse de rythme avec "tu es mon amour", gentil morceau acoustique où il se fait plaise. Agréable, sans plus. "Sans viser personne", chanson engagée sans l'être vraiment, marque d'un fer rouge sa misanthropie romantique, et je n'arrive pas à ne pas m'émouvoir lorsqu'il chante " déçu de vous, déçu de nous, je ne crois plus en rien du tout...". Et la musique est adéquate. "La Toxicomanie" est par contre presque consternant. A part la partition de la trompette, euh... comparer l'alcoolémie aux culs des filles, faut le faire... Le premier disque se termine par l'immense "Brandt Rhapsodie" (si quelqu'un peut m'expliquer pourquoi ce titre, ce serait sympa). Tel un "Variations sur Marilou", Biolay signe là un titre unique dans la Chanson française. Il bouleverse la narration avec un duo totalement en accord, et nous avec. Tout fonctionne parfaitement, la musique est belle à chialer. Deuxième disque, clairement plus optimiste que le premier (et personnellement celui que j'aime le moins) qui s' ouvre avec "l'espoir fait vivre". Derrière ce titre, je le trouve plus joyeux qu'il n'en a l'air. Et il dépote, en tout cas. "Prenons le large" a un texte très bizarre et ne m'emballe pas plus que ça. "Tout ça me tourmente" est magnifique, avec de nouveau des paroles terribles et une musique déchirante. "Assez parlé de moi", faut clairement pas faire gaffe à ce qu'il raconte. Parce que la musique prend toute la place, parce que le rythme est juste énorme et parce que ça fait un Trip exaltant au final ! "L' Buenos Aires", avec un refrain qui me fait presque penser à du Métal, une voix brésilienne et un extrait de comédie musicale (mais à mon avis, y' a que Biolay qui connaissait...), est ravissant. En plus, il apporte un sincère message à la rédemption via le voyage. "Raté, ballade folk magnifique et aux paroles vraiment trop courtes pour moi, est d'une sensibilité incroyable. Là-haut, je vais et viens... jamais personne ne me rejoins... personne ni rien... J'écoute ça, je peux pas m'empêcher de regarder le ciel, me sentir concerné, et être super touché... "Lyon Presqu’ile" est une superbe ballade, très entrainante, avec un supplément sifflement génial. "Mélancolique" est sympa, surtout pour son refrain, mais n'est pas d’anthologie non plus. "Reviens mon Amour" sonne remplissage pour atteindre les 11 titres comme pour le premier, il est assez inutile dans son propos. Texte banal pour un thème infiniment exploité, musique facile. "Jaloux de tout", par contre, est de nouveau un Monument. Je crois que ce n'est plus possible de faire une chanson sur la Jalousie après ça. Voilà. Il a tout dit, lui et sa musique hallucinante. Enfin, tout s'achève avec "15 Septembre", répondant du "15 Aout", terminant son histoire de rupture, et de la Solitude totale qui s'annonce. Enchainant les contradictions au niveau des intentions, le lien entre elles est très intelligente. Et là, il se fait plaise: refrain, réponse à la lettre (notamment un délire à propos d'une commode bleue, mais j'adore), et cerise sur le cadeau, un nouveau couplet de "la Superbe". La musique elle-même sonne comme un Au Revoir. What Else, sérieux ? "la Superbe" est, de bout en bout, d'une originalité redoutable, constamment créatif. Il meurt doucement, par petites touches. Et on est pétrifiés, par tant de talent.
Ne reste pas ici, il commence à se faire bien tard...
Si tu vois pas d'inconvénients, je vais rester encore un peu !