Un disque à la fois schizophrène et parfaitement cohérent avec lui-même.
D'un côté, de belles ballades alanguies, où des voix féminines déposent du miel sur des guitares parties au loin, dans l'Auvergne profonde (ce qui est drole et édifiant vu qu'il fut surtout enregistré aux USA), où il n'y a plus d'autre civilisation que les volcans et les forêts. "Falling in Love again", "Chanter est ma façon d'errer" et surtout "Taiga" sont les meilleures de cette catégorie, de vraies invitations à l'évasion ensoleillée, à la poésie dans la nature, tout en étant d'une introspection à l'intimité très agréable.
De l'autre côté, au contraire, les textes ont surtout un sens sonore, basé sur le dialogue entre l'accord et la voyelle. La mélodie se veut très pop/rock, trouvable dans un coin charmant de Clermont-Ferrand, Vichy, Aurillac ou Le Puy-en-Velay, où la civilisation revenue de ses ballades au fond d'elle-même cherche à danser, à se revitaliser dans sa sédentarité. "16 heure qu'est-ce que tu fais", "M le Maudit" et surtout "Cow-boy à l'âme french" sont les meilleures de cette catégorie, toutes plus entrainantes les unes que les autres, d'un charme voyou terriblement libre.
La fusion de ces deux aspects, est le morceau d'ouverture et l'une des meilleures chansons tout court de Jean-Louis Murat : "Comme un incendie". Arrangements enflammés, texte écorchés, mélodie surgie de la poitrine du Massif Central : le Puy de Dome crache un venin à la fois doux et violent, et transforme le cours ordinaire des choses en itinéraire vers le Soi.
Et c'est ce venin qui colle les morceaux entre eux...
Le meilleur album de Murat selon moi.