J'avais pas spécialement envie d'écrire sur cet album à la base. Je le trouvais juste dégueulasse. Et puis ce matin, j'ai sorti « The Renaissance » de Q-Tip, va savoir pourquoi. Et en rentrant du boulot, il tournait dans ma voiture. J'avais oublié cet album, il est vraiment superbe. Et à ce moment-là, j'ai repensé à PNL que j'avais écouté la veille. Qu'est-ce qui rapproche ces deux albums pourtant ? Rien du tout. D'un côté US, de l'autre français. D'un côté 2008, de l'autre 2015. D'un côté jazz hop, de l'autre cloud trap hip hop (comme on dit). Rien à voir, pourtant ça m’a refait penser à « Le monde Chico ».
Comment a t-on pu en arriver là ? Comment, aujourd'hui, les webzines hip hop peuvent encenser ce genre d'album et le comparer à "Mauvais Œil" de Lunatic comme je l'ai vu dans un article ? Comment les choses ont pu si mal tourner ?
Les jalons sont posés dès le premier morceau. N’y allons pas par quatre chemins, c’est triste. Concentré bas de gamme et pathétique de propos pas plus évocateurs que ceux d’un élève de 6ème en expression écrite, agrémentés de certains « Bat les couilles d’ces grosses putains qui voudraient me pé-pon le dard » ou encore « Tu testes, j’te baise ton père, ta mère, ta grand-mère » (peut-être une espiègle référence à Morsay), sur un flow contre-productif. Mention spéciale pour « Ma bitch, tu peux t’brosser. Ma bite traîne au rez-d’chaussée. ». L’ensemble finement nappé d’un vocoder de bon gout donnant la désagréable impression d’écouter Daddy DJ en train d’essayer de rapper, et dénotant surtout du manque de couilles caractéristique de nos businessmen nommés MC (ou même artistes) aujourd'hui en France. Le pire demeure quand il ose pousser la voix, comme dans « Porte de Mesrine » par exemple. On se retrouve alors dans un sinistre mélange hip hop/variété plaintif comme Maitre Gims en est le plus éminent sorcier, et nous les plus grosses victimes. Pour ce qui est du flow, on est plus proche d'une comptine d'enfant type "Am stram gram, pic et pic et colégram" que d'un réel morceau de rap (mais ça on commençait à avoir l'habitude). L’ensemble se révèle être une ignominie mainstream remuant un peu plus le couteau dans la plaie du rap français déjà gangréné jusqu’à la moelle.
Certains diront qu'il s'agit d’un hip hop "cloud trap", pour souligner le côté planant qui a volontairement été choisi. Une étiquette fine en terme de com' car elle poussera un public plus averti à s'y pencher par curiosité. En réalité, tout ça n'est qu'une mauvaise blague pour camoufler un ensemble mélodiquement bas de gamme et tout juste bien produit, pas même convaincant pour les amateurs de trap à la base. Les productions micro-ondables s’enchainent, la fadeur s’installe et demeure, pendant la totalité de l’album.
Mais finalement qui peut leur jeter la pierre, à ces bons commerçants ? Booba avait ouvert la voie il y a quelques années, en bombardant le marché hexagonal de ses grosses bouses comme on les subit encore. Personne n’avait soupçonné qu'autant de conneries proférées sur des instrus nanardesques puissent faire écho à autant d'esprits ici-bas. L'appât à fric était tout trouvé, un vivier inespéré. Dans cette eau croupie du rap français mainstream, où certains lézards dégueulasses et assoiffés de pognon évoluaient depuis un moment, d'autres y plongèrent plus récemment comme cet intellectuel nommé Kaaris. Puis PNL. La fenêtre de la médiocrité déjà entrebâillée depuis un moment avait été défoncée à coups de pied de biche par tous ces illettrés se prenant pour des artistes. Ils s’y étaient engouffrés pour faire fructifier leur vide intellectuel et leur manque de talent, leur absence de flow, puisque finalement, c’était ça que tout le monde voulait. C’était ça, la nouvelle expérience hip hop mainstream française.