Deux ans après Pounding the Pavement, Anvil revient avec ce Legal At Last, puissant, racé, heavy, mélodique et chargé d’histoire, tant le trio s’est replongé dans ses racines. Renouant avec Forged In Fire (1983) dont il reprend certains thèmes, les Canadiens poursuivent leur redressement, en nous livrant un album sérieux, toujours aussi frais et naïf, réalisé par des fans de metal pour des fans de metal. Car Lips et Robbo n’en ont que faire des modes. Si leur musique préférée revient actuellement sur le devant de la scène, eux n’ont jamais changé de cap. Alternant morceaux rapides dévastant tout sur leur passage, mid tempos qui donnent envie de secouer la tête en cadence et compositions pesantes comme des chars d’assauts, cet album est une réussite d’un bout à l’autre. De petits esprits, peu inspirés, vont s’attacher au capital sympathie emmagasiné après leur documentaire (mais c’était il y a douze ans les mecs, réveillez-vous !), alors que cinq albums sont sortis depuis dont les excellents Hope in Hell et Anvil is Anvil. Legal At Last les dépasse d’une bonne tête.
Débutant par le monstrueux « Legal At Last », aux riffs énormes et au refrain évoquant un générique de western, cet album nous propose le meilleur d’Anvil. Coincé quelque part entre Motorhead et Twisted Sister, ce titre est un déferlement jouissif qui nous prouve que l’envie n’a pas disparu chez ces musiciens. Il en annonce d’autres, comme « Chemtrails », aux fortes consonances priestiennes, que dominent des guitares dévastatrices, soutenues par une section rythmique en béton armé. Plus léger, « I’m Alive » nous prouve une nouvelle fois que Lips aime AC/DC et Ted Nugent, en nous offrant un heavy rock enlevé et plutôt joyeux, dont les paroles rendent hommage au rock’n’roll. Dans un style tout aussi enjoué, « Bottom Line » donne la pêche, grâce à une construction efficace. Pourtant, il est éclipsé par le furieux « Food For The Vulture » qui redonne au speed metal ses lettes de noblesse. Même « No Time », le titre bonus, s’engage dans cette voie, pour notre plus grand plaisir. Sans prétention, cette chanson n’en demeure pas moins très bonne et ferme l’album avec brio.
Les hymnes heavy ne sont pas en reste. Composé sur un rythme binaire, « Nabbed In Nebraska » est destiné à lever le poing en hurlant à tue-tête. On y retrouve cette propension d’Anvil à composer des chansons destinées aux fans. Plus addictif encore, « Glass House » s’appuie sur un refrain fédérateur, emporté par des chœurs masculins et un riff efficace. Lips se fend d’un beau solo, tandis que les couplets donnent eux aussi envie de chanter. Une vraie réussite à mi-chemin entre Grave Digger et le meilleur d’Anvil. Plus lourd encore, « Gasoline » évoque « Forged In Fire », avec une touche King Diamond. Terriblement efficace pour les amateurs de heavy, il écrase tout sans jamais lasser. Il en va de même pour « Plastic In Paradise », au riff épais et entêtant. Peut-être moins réussi que « Gasoline », il présente néanmoins une face incontournable d’Anvil, comme c’est aussi le cas du plus groovy « Said And Done », dans lequel on perçoit les influences de Black Sabbath.
Legal At Last est un excellent album, à classer parmi les bonnes réussites d’Anvil, un groupe qui poursuit sa route sans s’occuper des modes, et qui le fait bien.