Avec ce troisième album, une fois n'est pas coutume, la composition de King Crimson changea encore. On y fera la connaissance de Gordon Haskell et Andy McCulloch respectivement en tant que bassiste et batteur, qui partiront directement après Lizard. Mel Collins le saxophoniste vient également s'ajouter. L'enregistrement a lieu durant la août-septembre 1970, pour sortir en décembre.
La première chose à contester, c'est la voie du jazz dans lequel le groupe a voulu suivre. Cela se remarque notamment par Cirkus et son solo à la fin, un morceau entraînant mais inquiétant. Mais aussi dans Indoor Games et ses saxo entraînant le thème principal, Happy Family et ses accords au pianos, déstabilisant, le tout mené par une flûte, d'abord calme puis qui part en vrille pour lancer des assauts, glissendos, aidé par sur un brouhaha de cuivre ! Le morceau se termine sur le thème principal, au milieu d'une cacophonie de divers intruments et qui étrangement se calme juste au moment de finir.
Pour calmer le jeu, Lady on the Dancing Water est là, une douce balade menée à la guitare et la flûte, gracieux, apaisant. Mais il est clair qu'avec ses 2min45, elle ne fait pas le pois face à ses concurrents.
L'album se termine sur la chanson-titre, une fresque musicale de 25 minutes ! Comparable à The Devil's Triangle dans le précédent album, mais à la différence où c'était une chanson expérimentale dans le but d'en faire une ambiance démoniaque, Lizard est plus un medley de plusieurs styles...
La première partie, Prince Rupert Awakes est époustouflante. C'est les couplets sont admiratifs, mêlés aux dissonances du mellotron. Le refrain est un peu plus joyeux. La première partie s'achève sur un chœur puissant et mélancolique. On aurait bien pu finir un court morceau ainsi, mais la batterie a décidé de continuer, avec rythme semblable à un boléro (c'est d'ailleurs le nom de cette second partie), un rythme qui durera encore 7 bonnes minutes.
Dans cette seconde partie, le cornet entame un chant doux pour en finir sur du free jazz, de l'improvisation, ce genre de gros foutoir que King Crimson doit beaucoup apprécier (et moi aussi pour le coup).
Quant à la troisième partie intitulée The Battle of Glass Tears, je pense qu'il s'agit de ce long passage où l'ostinato est joué tantôt au hautbois, tantôt au mellotron, qui s'apparente à une sorte de Cirkus, mais bien plus cacophonique. La chanson se termine avec 4 petites minutes d'une guitare, avec un accompagnement minimaliste, la musique est inquiétante, et s'en va au loin progressivement.
Mais alors qu'on pensait la chanson terminée surgit une dernière musique, étrange, une sorte de musique de manège joyeuse mêlé de dissonances qui rend le tout incompréhensible...
On a souvent reproché à cet album d'être peu accessible, et je comprends. Un Lizard long de 25 minutes, contenant quelques passages qui ne semblent pas toujours cohérents, et le style... cacophonique de King Crimson, je peux comprendre que ça ne plaise. Cet aspect était déjà amorcé dans The Devil's Triangle.
Lizard est un album où le groupe arrive enfin à se détacher de ce qui a fait son succès. C'est sûrement celui qui représente le mieux l'esprit de King Crimson : celui de vouloir faire tout et n'importe quoi en même temps, et de rendre l'auditeur incertain de la suite. Quand il croit tout fini, tout repart de plus belle. La chanson-titre démontre parfaitement cet aspect, c'est un assemblage de divers genres sans vouloir faire quelque de construit, pas toujours très sympathique à entendre, mais finissant en un pot-pourri effroyablement ravissant.
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