En 1977, tous les vieux groupes de hard rock traditionnels sont ringardisés par l'explosion du punk... tous? non ! Quelque part en Amérique de grands groupes de hard rock résistent à l'envahisseur punk : Aerosmith venait de sortir l'année précédente son absolu chef d'oeuvre ("Rocks"), Van Halen allait bientôt sortir le sien avec son premier album éponyme, et bien entendu Kiss non content d'avoir déjà sorti un nombre imposant d'excellents disques en un temps si bref allait conclure sa lignée de grands disques des années 70 avec : "Love Gun".
Toujours dans le même esprit que "Rock and Roll Over", Kiss démontre une nouvelle fois sa capacité à produire des bons vieux morceaux de rock frais et dévastateurs à l'image de ce "I Stole Your Love" venant ouvrir l'album dont le riff tonitruant et redoutable d'efficacité a largement de quoi faire remuer la tête ou taper du pied. Au menu des classiques on retrouve également "Christeen Sixteen" ouvert par des notes de pianos, chanté par Gene Simmons et dont le riff de guitare lent au début et les chœurs scandant le titre du morceau sur les refrains ne cessent de s'accélérer progressivement pour arriver petit à petit à un véritable feu d'artifice vers la fin du morceau. Et bien entendu il y a le fameux morceau titre "Love Gun" constituant toujours à l'heure actuelle un passage obligé en concert, où Paul Stanley livre un chant puissant et remarquablement intense, particulièrement sur les refrains où sa voix atteint des sommets et se retrouve au bord de la rupture, tandis que la batterie de Peter Criss vient interrompre régulièrement le morceau avec des passages saccadés grandioses avant que le morceau ne reprenne son cours.
Mais "Love Gun" est également l'album du groupe par excellence, et celui qui rend le mieux compte du travail d'équipe de chacun. Ainsi pour la première fois le guitariste Ace Frehley peut enfin s'exprimer au chant lui aussi, et vu la qualité de sa voix on peut regretter qu'il ne l'ait pas fait plus tôt. Ainsi sur "Shock Me" Ace nous gratifie d'un riff et de solos de guitare accrocheurs tout en maintenant une ligne de chant impeccable. De plus les morceaux font ressortir parfaitement la personnalité de chacun des musiciens, par exemple : le côté lubrique et "monstre" étant clairement présent sur les morceaux chantés par Gene Simmons : "Christine Sixteen", "Got Love for Sale", et "Almost Human" qui a au moins le mérite de contenir un des riffs les plus insolites et inventifs du répertoire de Kiss. A noter également que le morceau concluant l'album : "Then She Kissed Me" est une reprise d'un groupe féminin "The Crystals" et est pour le moins très agréable à l'oreille tout en mettant en avant et confirmant le côté "Glam" que distille Stanley au sein des morceaux du groupe.
Avec un son plus sec et direct que sur "Destroyer" et des compositions encore plus inspirées que sur l'album précédent Kiss fait très fort et justifie de ce fait toute la "Kissmania" qu'il déclenche en ces années victorieuses, même si la surproduction de produits dérivés peut sembler quelque peu excessive pour certains... L'album sera rapidement certifié triple disque de platine et n'aura rien à envier en terme de popularité à ses prédécesseurs. Il semblerait d'ailleurs qu'il s'agisse historiquement parlant du tout dernier album de Kiss à faire autant l'unanimité auprès des fans, les premières années "sombres" du groupes liées à des tensions internes et à des choix artistiques risqués n'allaient pas tarder à survenir...
Chronique écrite le 3 février 2014