Voilà donc le chant du cygne de Madrugada. Mais comment cela pouvait-il être autrement ? Après le brusque décès de Robert S. Buras l'été dernier, le groupe ne pouvait survivre. Car Madrugada a toujours été l'association de trois forces vives : un chanteur baryton-basse majestueux (certainement l'un des meilleurs de sa génération), un bassiste au groove démoniaque, et enfin cet incroyable guitariste, le fameux Buras.
Ce mec plaquait ses accords majeurs ou mineurs comme autant de coups de fouet, avec une classe hallucinante ; il vous balançait des soli furieux, chauds et techniques, carrément envoûtants, en vous laissant sur le cul.
Et enfin, ce mec brillait de mille feux sur scène. Arpèges voluptueux, riffs ultra rock'n roll, peu importait, il était là et imposait sa présence de guitariste génial, peu communicatif mais résolument attachant.
Madrugada est un album posthume, mais où Buras joue du début à la fin. A vrai dire, on jurerait qu'il est là, partout. Dans le feu brûlant de "Whatever Happened To You ?" ou de "Highway Of Light", dans les prouesses techniques ébouriffantes de "The Hour Of The Wolf".
Fantôme à la beauté mélancolique dans "Honey Bee" et "Valley Of Deception", ou vénéneux dans le superbe single "Look Away Lucifer", Buras plane sur les performances pourtant déjà inspirées de ses deux anciens amis.
Un parfum de tristesse emballe donc ce testament en forme d'hommage, qui se clôt d'ailleurs sur la voix du mort (rock'n roll, superbe), s'accompagnant d'une guitare sèche : "Our Time Won't Live That Long"... Troublant, surtout quand on sait qu'elle n'apparait sur aucun autre album des nordiques !
Ceux qui ne connaissent pas le groupe seront immédiatement séduits par ces chansons indémodables, captivantes ; les autres ne pourront que déplorer le décès d'un grand monsieur du rock, disparu à seulement 31 ans, tout en partageant la joie de découvrir le dernier et néanmoins excellent disque de ce groupe majeur des années 2000.