Après le décès d'Hillel Slovak et le départ de Irons, on aurait pu penser que c'était le clap de fin pour les Red Hot Chili Peppers qui reviennent pourtant avec ce qui est un de leurs meilleurs disques à l'époque, et aujourd'hui encore considéré comme étant un grand moment dans la vie du groupe. Un avis que je ne partage guère. En effet, pour moi Mother's Milk respire le devenir. Le groupe n'a pas pleinement fait son deuil d'une part, et de l'autre la cohésion n'est pas encore au rendez-vous.
Si le jeune John Frusciante arrive vite à intégrer son jeu de guitare, profondément influencé par Slovak, Chad Smith n'ose pas encore offrir toutes les possibilités de son jeux de batterie. Ou, disons plutôt que les Red Hot n'ont pas encore découvert le talent de l'homme. Résultat, on a l'impression que la session rythmique n'est pas aussi unie qu'elle le devrait.
Le manque de lien en terme de rythmique est très regrettable et donne un aspect non-contrôlé à l'album. Ceci est une chose claire. C'est d'autant plus remarquable aujourd'hui, en connaissance de ce que sera l'avenir des Red Hot. Frusciante à la guitare n'ose pas épanouir son jeu en lui donnant les accents rock futur pour obtenir une cohésion plus grande et permettre de s'éloigner de son illustre prédécesseur.
Enfaite, le principal soucis de cet album est ce sentiment que chacun va dans son sens. Le chant, la basse, la batterie, la guitare, chacun est très bon, mais la réflexion musicale n'est pas commune.
Quand on sait que les Red Hot composent principalement à partir de Jam Session ça devient bien claire que les différents membres ne se connaissent pas encore assez bien.
Je rajouterais que, comme d'habitude (et cette habitude ne fut globalement jamais perdu par le groupe), l'ordre des morceaux manquent de cohérence. Cela devient même parfois assez dur à suivre tant ça peut être très varié.
On peut cependant noter que les sujets funny sont présents dès le début. Good Time Boys est, dans un délire égo-trip bien amusant, la preuve que le groupe tient bon. Magic Johnson reste aussi dans ces moments délires (qui malheureusement m'a bien moins séduit). Il faut attendre ce passage pour avoir le très sympathique (bien qu'un peu redondant) Nobody weird like Me ainsi que le touchant Knock me Down. Ce dernier faisant écho à la reprise de Stevie Wonder, Higher Ground, titre très remarqué, peut être le plus réussi de l'album (et même pas une composition originale). A l'inverse, la reprise de Fire est bien moins réussie à mon goût, sans être totalement râté, ça reste très basique.
On a également le droit à un petit moment purement instrumentale très rapidement sympa mais bien trop doux pour être intéressant. Au contraire, la voix aurait bien marché sur Pretty little Ditty si Kieldi avait osé tenter un chant plus mélodieux (ça arrivera heureusement). Heureusement, après une transition inexistante et un violent Punk Rock Classic, on a le droit à un petit final renvoyant à Guns'n' Roses qui fera beaucoup rire. D'autant plus que le morceau en lui-même n'est pas inoubliable.
C'est marrant, car « pas inoubliable » c'est un peu ce que je ressent avec plus de la moitié des titres. Ca me semble assez mal maîtrisé à mon goût. Le problème de cohésion est malheureusement très puissant. Mais ne nions pas que le chant n'est pas toujours parfait, notamment les refrains, boostés aux choeurs plutôt que par le talent vocal propre d'Anthony. Bien regrettable.
Le côté funk n'est pas perdu et un aspect rock se pose, quand au délire rap, celui-ci n'a pas encore parfaitement évolué et n'est pas toujours très plaisant. Ca respire les années 80 (normal me direz vous) et ça, il faut l'apprécier en soi.
Finalement, si Mother Milk est devenu un album si célèbre, ce n'est pas tant par ses qualités propres, plus que nuancable. En effet, le disque manque d'originalité, les transitions sont dures à subir, la cohésion est totalement à l'ouest (je sais je me répète), on se sent presque perdue face à la musique par moment. A force de pousser dans tous les sens, on sent l'énergie mais on a du mal à se défouler car c'est, finalement, impulsant assez peu l'auditeur. Mais, si il est devenu si célèbre, c'est parce que, en plus de qualités musicales propres (ne nions pas le niveau incroyable de Flea à la basse, à tout hasard), ce disque montre le début d'une formation qui va offrir Blood Sugar Sex Magic, c'est à dire un haut pic de la musique. On est entrain de voir le groupe qui va révolutionner la fusion rock/funk/rap.
Soyons patient, ce premier album de cette nouvelle formation est sur le point de changer le monde, mais ce n'est pas avec Mothe'r Milk.