Plus qu'une critique de ce disque bien précis, j'en profite pour faire quelques réflexions générales sur les enregistrements Supraphon d'oeuvres de Stravinsky par Ančerl et le Philharmonique tchèque dont seul celui-ci est présent dans la base de données (ben tiens...)
Tous les enregistrements d'œuvre de Stravinsky par Ančerl et le philharmonique tchèque sont des incontournables. Dans chacun, le Sacre, Oedipus Rex, la symphonie de psaumes (dont c'est ici la version que je préfère), c'est l'osmose du chef avec son orchestre qui frappe d'abord. Il y a une façon d'évidence qui émane de ces interprétations, une sorte d'impression de facilité, de clarté immédiate. Mais il y a aussi la magnificence des textures que les deux réussissent à produire, une richesse pure et solennelle du son qui force le respect. On parle souvent du son tchèque de Ančerl, je suppose que c'est à ça que ceux qui disent ce genre de choses pensent, à cette espèce de majesté gracieuse, aérienne, bohémienne dira-t-on...
Son sacre est magnifique, et encore une fois il ne donne même pas l'impression de forcer. L'énergie est omniprésente, les cuivres sont clairs à plaisir, les percussions claquent, mais à la cool... On n'a pas l'impression comme avec Dorati et le Minneapolis ou Bernstein et le New York Symphonic que le chef pousse au cul et force l'orchestre à extraire une force surhumaine de ses tripes. C'est une œuvre organique qu'Ančerl offre, généreusement lumineuse.
De tous les enregistrements stravinskiens réédités dans l'édition gold seule celle des Noces manque de punch à mon gout. Je préfère largement la version de Bernstein qui fait la part belle à l'énergie débridée des percussions et du piano. La version d'Ančerl soigne la direction vocale mais laisse un peu en retrait les instrumentistes. De même je préfère Bernstein dans la messe mais seulement pour des raisons de préférence personnelle: la version d'Ančerl est magnifique, large et imposante, là où celle de Bernstein est intimiste, retenue et spirituelle. Les gouts et les couleurs...
Quelles que soient mes réserves (mineures) sur certaines interprétations, ces trois rééditions sont de petites perles, chacune à leur façon. Pour quelqu'un qui chérit autant que moi l'art du grand Igor, ce sont de vrais plaisirs de gourmet.