Pour parler du dernier album de Vampire Weekend, Télérama titre "Un bijou de perfection pop". Je comprends l'utilisation de perfection, un petit peu moins celui de pop.
Qu'est-ce que la pop ? Si c'est un qualificatif se voulant objectif et visant à désigner quelque chose de "populaire" au sens de connu et apprécié de (presque) tous, pas sûr que cet album ni ce groupe y correspondent. Ils ne sont pas complètement confidentiels, bien sûr, mais n'ont rien à voir avec les succès planétaires de Taylor Swift ou Billie Eilish par exemple.
S'il désigne une musique dont les caractéristiques sont une structure rigide et des prises de risques harmoniques limitées au minimum syndical, alors il tombe peut-être encore plus à côté. La musique de Vampire Weekend, particulièrement sur ce dernier opus, est complexe, riche, changeante, parfois déboussolante. Les cuivres et les cordes se mélangent à des pianos et des batteries traités d'une manière très particulière, et n'ayant pas grand-chose à voir avec ce que l'on entend d'habitude par "pop".
Wikipedia classe le groupe en rock indépendant, worldbeat, et en pop affublée de toutes sortes d'adjectifs : indie (à nouveau), art, baroque. On n'est pas beaucoup plus avancés, mais on se rapproche peut-être d'une caractérisation qui rend justice à la réalité de la musique proposée.
Ce qui est sûr, c'est que l'album mérite qu'on y prête l'oreille. Les mélodies sont envoûtantes et souvent déroutantes, et la musique est généreuse et ambitieuse. Les textes sont parfois poétiques (comme sur Mary Boone ou Pravda, mes deux morceaux préférés), et savent aussi se mettre en retrait pour mieux laisser ressortir les innombrables instruments utilisés. Surtout, les morceaux sont beaucoup plus longs en moyenne que sur les albums précédents, et font la part belle aux structures mouvantes et surprenantes, nourrissant un plaisir renouvelé à chaque écoute.
Vampire Weekend, ce n'est peut-être pas de la pop, mais avec cet album, une chose est sûre : c'est très bien. Et à côté des (intéressants) débats théoriques sur la catégorisation, c'est amplement suffisant pour obtenir 9/10. C'eût été un 10/10 sans la présence du morceau The Surfer, dont je n'arrive décidément pas à saisir la place au milieu du reste. Pour le reste, il faut y aller les yeux fermés, ne pas trop s'interroger sur ce qu'on écoute, et profiter.