P-Town
6.9
P-Town

Album de Jazzy Bazz (2016)

Qui est le vrai titi parisien ?

Serait-ce par paresse intellectuelle, par manque de temps ou par purisme exacerbé ? Le fait est que j'ai très peu écouté les skeuds des différentes équipes de Nekfeu & co (1995, L'Entourage, S-Crew...).
J'ai apprécié La Source, mais j'ai vite oublié l'album par manque de fond. J'ai trouvé Guizmo très bon sur certains titres mais hélas regretté sa très grande irrégularité suivant ses albums.
Je n'ai pas accroché à En Sous-Marin, encore une fois par un manque réel de fond. Je n'ai pas encore écouté Feu.
Bref, le défaut que j'ai personnellement reproché à la scène parisienne émergente est la suprématie de la technicité en dépit de messages, d'histoires ou ne serait-ce que d'originalité.


C'est donc d'une oreille peu attentive que j'ai commencé à écouter le premier album du jeune Jazzy Bazz. Et merde quoi ! J'ai vite débranché mon casque de mon port mini-jack, pour y connecter mes enceintes et mes basses !


Ecouté d'une traite, plusieurs fois de suite, avec P-Town j'ai découvert un incroyable artiste.
Inspiré par de grandes légendes de l'ancienne école parisienne (Les Sages Po', Lunatic, Oxmo Puccino, La Cliqua...), Ivan réussit sur cet album un véritable tour de force : mêler la technique du Rap français de l'âge d'Or à un véritable sens de la narration, que celle-ci soit un simple egotrip ("3.14 Attitude", "Le Roseau"), un délire entre potes ("3.14 Boogie", "Lay Back"), un hommage à sa ville native ("P-Town", "3h33"), une missive introspective ("Les Chemins", "Trompes de fallope") ou un engagement sincère ("Amen", "Fluctuat Nec Mergitur).


Mais loin du simple copier-coller de la grande époque de Paris (de MC Solaar, NTM et Assassin à la Scred Connexion et les X-Men), Jazzy Bazz réussit en outre à développer sa propre personnalité, totalement ancrée dans son époque par des prods incroyablement réussies et issues de tous les styles (trap, jazz rap, boom-bap, mobb deepien, soulful...) et un flow d'une variété étonnante, tour à tour doux et sensuel puis soudain agressif et violent.


Au-delà de cet aspect technique, à l'écoute de l'album l'on ressent le mec amoureux du rap et de la culture hip-hop de manière générale, le gars qui a surement autant rodé des albums de Big L, de Run DMC, de Eminem ou de Kendrick Lamar que des albums de IAM ("Le Roseau" est sûrement le plus bel hommage fait à Shurik'n depuis longtemps), Hocus Pocus ou encore Tandem.


Moi qui n'aime vraiment pas le football, il a même réussi à me faire aimer le PSG le temps d'un morceau ("Ultra Parisien").


Trève d'éloges, Jazzy Bazz est définitivement l'un des meilleurs représentants de la nouvelle scène parisienne.
"NTM, Solaar, IAM, c'est de l'antiquité". Certes. Mais désolé les mecs : Kalash Criminel et Lacrim, c'est le Moyen-Âge. "Le futur que nous réserve-t-il ?" : je ne sais pas. Mais si SCH et PNL sont dans le "Turfu", c'est que "Demain c'est loin". Personnellement, je fais face au présent.

jeyare
9
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Créée

le 7 août 2016

Critique lue 360 fois

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