PORNOGRAPHY: comment Robert Smith et ses comparses sondent le côté le plus nihiliste de leur esprit. Disque anti commercial au possible, quand je pense à "Hanging Garden" en single... même ce titre reste foncièrement torturé et pas formaté pour la FM naissante de l'époque (1982). A 20 ans un disque pareil vous remue complètement, bien sûr si on est fragile émotionnellement. Aucune légèreté mais peut-être beaucoup de cynisme dans des titres hypnotiques: basses bien pesantes, rythmique affirmée, voix en complainte. Pornographique, ce disque l'est sans doute: car s'il met vraiment à nu son âme ou ses angoisses existentielles, Robert Smith se révèle être à 23 ans un jeune homme en pleine psychose. Les huit titres tels des cauchemars abordent des thèmes plutôt opaques: difficiles d'accès, les textes sont aussi énigmatiques que la pochette du disque. On parle beaucoup de mort tout au long de l'album. Ce disque marque la fin d'une période pour le groupe: période riche d'expériences musicales osées pour l'époque (Seventeen Seconds et Faith déjà au style bien épuré), prise de produits interdits, concerts comme des rituels pour fans en transe. La suite sera quelque mois plus tard un virage complet: la sortie du simple "Let's go to bed", tentative malheureuse (pour les fans de Faith) d'écriture d'un titre pop. Un pied de nez de Smith et Tolhurst en duo à toute la planète "cold wave" "new wave" de l'époque. Finalement plus de 30 ans après, "Pornography" garde son mystère glacial et sa puissante force de suggestion. Peu ancré dans son temps car en décalage, il est devenu intemporel: pas rock, pas pop, pas funk, on le dit "cold" en fait il est surtout anglais: seule la Grande-Bretagne de Thatcher était capable de donner naissance à un objet pareil: Pornography est le résultat d'une époque (post punk): angoisse d'une jeunesse dans une société où le libéralisme économique est synonyme de monstruosité.