Le troisième album de Björk ressemble à une version enrichie de son prédécesseur Debut, tout aussi éclectique mais doté d’une production bien plus fastueuse. Ainsi, si la chanteuse marquait en partie par sa douceur, le premier titre démontre déjà l’agressivité dont elle sait faire preuve. Sur un sample tonitruant de « When The Levee Breaks » de Led Zeppelin, elle entonne un hymne puissant contre l’apitoiement sur soi-même. Pas si facile d’assimiler le message de cette voix hargneuse et impitoyable égrener de désarmantes vérités, mais « Army Of Me » est pourtant une chanson positive qui fait du bien à l’écoute.
La suite ressemble à une célébration de l’alliance des contraires : mélange de cordes et de rythmes électroniques pour « Hyper-Ballad », puis alternance parfaite entre chansons douces et agressives. Ainsi, à la plainte désespérée « The Modern Things » succède l’enjouée « It’s Oh So Quiet » et son ambiance de music-hall, puis le bulldozer « Enjoy » et la triste et délicate « You’ve Been Flirting Again ». Et c’est comme ça jusqu’à la fin, la puissance succédant à la timidité puis l’ardeur au dépouillement, l’orchestre se déchaînant avant de laisser place à des sonorités plus subtiles et expérimentales, jusqu’au voyage acoustique de « Headphones ».
Post est ainsi à l’image de « It’s Oh So Quiet », alternant entre des moments très calmes et – zing boom – des big riots : la perspicacité avec laquelle l’artiste décrit les bouleversements apportés par la naissance du sentiment amoureux se répercute sur l’ensemble de l’album. Manque peut-être la relative naïveté de Debut : ce que Björk gagne en maîtrise, elle le perd en fraîcheur, mais la qualité reste au rendez-vous.