Voie sans issue...
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Ané n'est pas heureux. Pas d’heureux sentiment, du ressentiment, oublié ? Toujours est-il qu’il n’est plus qu’un spectre de lui-même.
Miné par le succès imprévu et inapprouvé du Twenty-Two bar, éprouvé, il s’engouffre alors dans des voies ébouleuses, un horizon quelque peu endeuillé d’une mort d’âme. Il n’aperçoit plus grand-chose, ne retourne à la musicalité que par à-coup, par hasard peut-être.
"Remué" est un royaume gargouillant telle une glotte, un magma gluant et pataugeant dans un non-sûr, non-su, non-dit permanent, entrebâillé pleutrement d’un semblant de voix dépossédée d’un artisan de l’onde qui voit l’onde lui échapper.
Les mailles se défont, l’émail satiné que para parfois d’élégance réservée les ouvrages du passé semble bien suranné, quand tout se veut dépassant la personne aux commandes. Il avait découvert aux Etats-Unis le free-jazz, voulait s’en approprier certaines propriétés dans une structure "rassurante". En résulte quelque chose de flou, sur laquelle s’apitoiera Dominique à coup de voix peu assurée, d’une manière particulière : sur "La Fossette", c’était sans doute plus une réserve mignonne et naïve, comme apeurée, qui amenait un effacement partiel des cordes vocales d’un timide nantais ; là, c’est incertain et tremblant, on ressent quelqu’un comme pas tout à fait à sa place, effrayant de sincérité dérangeante.
Ils misent sur des chevaux aux pattes ankylosées
Et au moment de perdre ils misent encore plus gros
Ils trouvent qu'on les oublie, qu'on ne les soigne pas assez
Et se font tout petits dès qu'ils peuvent en dire un mot
Oh comment certains vivent...
Car en ça, ému, on s’aperçoit avec un peu de recul que, Ô bien plus qu’un album coquille-vive, "Remué" est l’album le plus écorché-vide, et en ça le plus franc, d’Ané, par là même qu’elle lui échappe et qu’il la réfute. Le disque ne lui plait plus, il ne se retrouve plus dedans, car il révèle une photographie, à mes oreilles développant ce négatif sonore, car il dévoile d’occultés ressentiments - Nos pères possède alors un texte bouleversant, tout comme les autres pièces de ce marasme d’émotions - et une tendance à la dissonance et à l’absence de mélodie forte rare chez Dominique ; que ce soit par le biais d’un minimalisme inspiré de Mark Hollis et de Hood sur des extraits comme Le détour ou les superbes samples de vents en couches superposées et éclatées de Rien qu’à voir ou au contraire, par une torture noise bien plus poussée des guitares, accompagné de samples oppressants, et de cette batterie fantastique de diversité et de contrecoups, le tout noyé dans un accouplement souvent imprécis, noyé, à l’aspect lo-fi parfois.
Lors, après ces constats, deux chemins aux horizons troubles s’offrent à l’auditeur ; ou bien l’album est condamné, on n’y cherchait pas tant ça, le piano et la voix n’y feront rien ; ou bien Dominique l’est, et on peut alors surnager de piste désabusée en plage mi-refusée, il faut alors faire un effort honorable d’ouverture et de recherche : on dépèce petit à petit la côte quadrillée de la pochette, on retourne le sable mouvant, mué pour espérer en retirer une qu’elle-conque ou une huître perlière, pendant cette traversée d’océan cassé, dont le ciel est couvert de l’ombre d’Ané, d’une tension à fleur de peau.
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Créée
le 25 mai 2016
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