Fugazi est le groupe, le bébé pourrait-on dire, de Ian Mac Kaye qui est avec Jello Biafra (ex Dead Kennedys) le personnage central et incontournable de toute la scène punk hardcore américaine.
Après Minor Threat – groupe punk hardcore culte mais éphémère - il fonde Fugazi et il est également responsable du label indépendant Dischord qui a sorti plein de bons groupes indépendants/alternatifs, souvent engagés.
Il fut également l’un des initiateurs du courant « straight edge » dans le mouvement punk.
« Repeater » est le premier album du groupe sorti en 90. Et l'un des meilleurs avec « In on the kill taker »
Avec Fugazi la musique se fait plus posée, l’énergie présente est maîtrisée, la violence est en partie dissoute dans la tension qui est palpable, le côté « émotions » est plus présent (d’où le terme d’émo-core, mélange d’agressivité et d’émotions).
L’énergie est là bien sur mais par rapport à Minor Threat je dirais qu'elle est comme passé à travers un filtre.
Fugazi propose du rock que je qualifierais volontiers de cérébral, d' « intelligent » (et pas seulement pour les textes), croisement de post hardcore, d’émocore, de noise et de rock « classique » avec deux chanteurs qui se partagent les vocaux (et aussi les guitares) Ian Mac Kaye et Guy Picciotto.
Ce que j'aime aussi avec ce genre de groupes post hardcore mélodique (par exemple Quicksand) c'est que les guitares n'écrasent pas la rythmique et lui laissent volontiers une place importante, notamment à la basse très à son aise et qui peut s'exprimer librement sans être un simple faire valoir.
« Turnover » et « Repeater » qui ouvrent l'album donnent le ton c'est typique du son Fugazi mais bizarrement ce ne sont pas les meilleurs titres du disques.
Ceux ci sont plutôt à rechercher du côté de « Brendan #1 », « Merchandise » , Sieve-fisted find » et « Greed » tous aussi excellents les uns que les autres.
« Blue print » et « Two beats off » présentent un côté plus mélodique mais toujours très bon.
On finit par le très beau « Shut the door » entre calme et noise maîtrisé.
Mais attention encore une fois ne vous attendez pas à un vrai disque de punk, Fugazi s’est éloigné de ce style et n’a plus qu’un lien assez lointain avec la furia et la rapidité agressive de Minor Threat.
Seuls « Brendan #1 » et « Styrofoam » sonnent encore véritablement punk rock.
Mais Fugazi c'est aussi et surtout un groupe symbole d’intégrité, fidèle à des principes mais sans sectarisme (comme peuvent l’être parfois certains groupes de la scène punk hardcore américaine ou anglaise).
Le groupe a fondé son label (Dischord) et sort ses albums sur ce label malgré les propositions de majors, fait régulièrement des concerts de soutien pour différentes causes (anti racisme, anti sexisme…), propose des prix de CD ou vinyls modérés, de même que les places de concert abordables.
Fugazi est l’un des rares groupes dont l’intégrité reste irréprochable malgré les nombreuses sollicitations dont il fait l'objet dans les années 90 là où beaucoup de groupes furent récupérés par le « business » et son univers impitoyable.
Comme Helmet, Sonic Youth, Jesus Lizard et d'autres il a musicalement parlant marqué et influencé les années 90 qu'on cantonne trop souvent pour le rock au mouvement grunge qui a certes apporté quelque chose au rock mais qui n'était pas le seul mouvement intéressant.
Car la vague post hardcore a également accouché de quelques pépites dont « Repeater ».