Avec Return to Ommadawn, Mike Oldfield confirme l'omniscience qu'il a sur sa propre discographie. Ce n'est pas vraiment nouveau, ce n'est pas pour rien que le maître remastérise lui-même ses propres chefs-d’œuvres. D'ailleurs, une bonne partie de ses albums ne sont-ils pas déjà des remakes, des relectures de ses œuvres ? On peut entendre en filigrane, dans la plupart de ses disques des gimmicks, des airs, des allusions à d'autres titres qu'il a lui-même composé.
Cette fois-ci, c'est vraiment un « retour » dans un de ses univers que propose Mr Oldfield, dans le sens où l'on retrouve dès les premières notes une ambiance, des instruments, des chœurs, des sons des lieux familiers, que l'on avait déjà longuement parcouru, décortiqué, rêvé si l'on était fan du bonhomme. Et on les redécouvre ici avec joie et émotion car Ommadawn est souvent considéré par ces mêmes fans comme son meilleur album progressif. J'aurais tendance à préférer le plus ambitieux Incantations dans son aventureuse période pré-pop, ayant toujours trouvé un peu en dessous la deuxième partie d’Ommadawn, en particulier à cause d'une première trop magistrale.
Dans ce retour, les moments et les thèmes mémorables sont infusés dans les deux parties, ce qui rend son voyage beaucoup plus agréable et prenant sur la longueur. Malgré un déferlement d'idées dont il nous a habitué et qui ne peut qu'exciter tout amateur de samples, l'ensemble est cohérent et distille même une sérénité, une grandeur d'âme qui étaient moins présentes dans Ommadawn, premier du nom. Nous ne sommes pas que dans la simple nostalgie, il déconstruit cette dernière pour en faire autre chose. Moindre défaut, certaines transitions sont un peu poussives, mais là encore, ce n'est pas la première fois que Mike est maladroit sur ce terrain… nous n'allons pas lui en vouloir de se la jouer acoustique !
Il doit faire bon d'être fan du monsieur car il joue constamment avec son public et sa musique. « Saurez-vous retrouver dans mon immense discographie où est-ce que vous avez déjà entendu ce p'tit truc ? » Taquin, il réutilise sur son « retour » plusieurs fois des débuts de thèmes du premier, deux-trois notes, et alors qu'on croit reconnaître la mélodie, il part sur d'autres notes, réinventant ainsi un univers que l'on croyait acquis. Les plus attentifs entendront aussi des références à des flopées d'autres de ses titres, la plus flagrante étant celle renvoyant à « The Bell », les plus perchés préféreront comparer cette suite à Hergest Ridge ; l'important est que le maître soit de retour !
Mike Olfdield a toujours été emprunt à la folie, et devant le vertige que provoque ce tourbillonnement d'idées et de déjà-vus dans sa discographie, on peut juste admettre que cette folie confine au génie. Y en a t-il un autre qui arrive à revisiter son œuvre, à retrouver son esprit même avec autant d'inventivité, de justesse et de beauté, de façon à l'égaler, voire la supplanter après 45 ans de carrière ? Un grand esprit à la Lynch… Doit-on rappeler qu'il joue lui-même la vingtaine d'instruments présents sur cet album ?
A partir de là, oui, si vous n'avez pas encore mis les pieds dedans, je vous recommande chaudement de découvrir l’œuvre du Monsieur, vous l'aurez compris, et j'espère que mon enthousiasme vous a convaincu.