« Le premier album de Yael Naïm a dépassé tous les objectifs : un triomphe, qui derrière quelques titres faciles (*New sou*l en tête,) recelait quelques diamants noirs. A l’heure du deuxième album, Yael Naïm, qui désormais inclut totalement David Donatien dans la paternité de sa musique, a décidé de creuser le sillon qui a fait son succès. La Franco Israélienne aurait pu choisir de prendre des risques, d’aller vers autre chose et bien non, She was a boy est bel et bien un disque propret, bien sous tout rapport mais manquant cruellement de chair, de sang, de tripes. L’album a dû être un bestseller des fêtes de Noël, le genre de cadeau que l’on peut faire sans trop se mouiller et qui conviendra aussi bien à la petite sœur qu’à la grand-mère. Que Yael Naïm se méfie, elle pourrait bien devenir la Diana Krall ou la Norah Jones de la pop folkisante. Bon goût mais attention aux bâillements en fin de disque. A moins que She was a boy ne finisse en parfait album de fond sonore comme la musique qui plait à tout le monde sans faire de vague. On peut accuser Naïm de tomber dans la facilité de faire deux fois la même chanson dans son album :
Come home version fanfare et Go to the river version orgue de barbarie, les deux faces d’une ritournelle tellement inoffensive qu’elle en devient anecdotique. On peut surtout l’accuser de reléguer ces arrangements chiadés en arrière cour pour ne mettre en avant que sa voix et ses mélodies gentillettes : par exemple le quatuor à cordes sur I try hard est indiciel et Never change est au blues ce que Canada Dry est au whisky, son ersatz inoffensif. On peut y voir de l’élégance ou regretter ce parti pris un peu tiède. Puppet a un esprit caraïbe tendance cool. Mystical love a quant à lui, un petit côté Hit a road jack. Car She was a boy est ainsi : folk, pop, blues, fanfare, gospel…mais chaque fois dans une version aseptisée, comme un fond différemment peint changeant derrière la jolie voix de la jeune femme. Bref l’album a tendance à se dérouler sans accro mais aussi sans passion. Néanmoins, on relève la tête quelquefois : pour l’envoutant my dreams et ses chœurs de sirènes ; pour man of another woman et ses volutes orientalistes où Naïm nous emmène ailleurs dans tous les sens du terme. C’est peu mais c’est déjà bien, suffisamment pour espérer plus de Yael Naïm à l’avenir et nous laisser pour l’instant sur notre faim.