Robert Wyatt, ce monsieur en fauteuil roulant et à la longue barbe blanche, sort en 1997 un album saisissant : Shleep. Connu entre autres pour les préoccupations politiques contenues dans ses œuvres, l'ancien batteur de Soft Machine retrouve cette année-là l’essence de ce qui avait constitué le début de sa carrière solo.
Se rapprochant du merveilleux Rock Bottom pondu en 1974, Shleep est une œuvre intimiste qui nous malmène, et dont la variété des pistes oblige une assimilation lente, progressive et personnelle.
Depuis Heaps of Sheeps jusqu’au Blues in Bob Minor (coucou l’ami Dylan !), sans oublier le terrible September The Ninth, notre imaginaire est porté vers les hautes strates du plaisir auditif. Fort d’une contradiction permanente entre des arrangements paresseux mais oppressants et des mélodies libératrices, cet album puise son intérêt et son originalité dans sa composition mais surtout dans les émotions qu’il nous transmet. On enchaîne alors les pistes comme les étapes d’un lent voyage, lévitant à quelques kilomètres d’altitude… Ce disque nous stimule tranquillement, comme s’il nous plongeait en état de stase, et l’on en redemande. Plusieurs écoutes permettent plusieurs voyages, avec chacun ses propres images et ses propres sensations. L’atterrissage est finalement assuré par The Whole Point Of No Return, petit outro trompettisé des plus mielleux.
Une nouvelle fois, Wyatt démontre toute sa maîtrise de l’album-concept : les onze pistes sont très justement mises en relation autour d’un même thème, d’une même idée que j’ai personnellement située entre la douceur, le repos troublé et l’envol spirituel. Finalement, la pochette du disque, petite merveille, semble en accord avec mon ressenti.
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