Comme quasiment tous les fans des Beach Boys, j'ai découvert Van Dyke Parks grâce à sa collaboration avec Brian Wilson pour le projet (à l'époque) inachevé de SMiLE. Les paroles à l'inspiration surréaliste de "Heroes and Villains" et de "Surf's Up" me plaisaient énormément et j'ai tout de suite voulu en savoir plus sur ce jeune poète. Et c'est en fouillant que je me suis rendu compte que cet homme était omniprésent dans la culture pop (le mec a quand même collaboré avec Ringo Starr, Randy Newman, The Byrds, Earth, Wind & Fire et plein d'autres). J'ai alors découvert Orange Crate Art, un album en duo avec Brian Wilson sorti dans les années 90, qui malgré un falsetto trop forcé de Brian et des arrangements un peu trop 90's, restait globalement très bon (j'en ferai sûrement la critique très bientôt).
C'est alors qu'en en parlant autour de moi, un album est revenu souvent dans les discussions : Song Cycle. Présenté par certains comme le chef d'oeuvre oublié des années 60 et par d'autres comme la plus grande escroquerie de l'histoire, je me suis vite aperçu que cet album ne laissait personne indifférent.
J'ai donc décidé d'y jeté un oeil pour m'en faire un avis... Je ne savais vraiment pas à quoi m'attendre et il se trouve qu'après la première écoute, j'étais vraiment perturbé. Bon, je suis un très grand amateur de musique pop expérimentale (SMiLE en est le meilleur exemple) mais là, c'était tout autre chose. Les chansons étaient vraiment très difficiles à écouter entièrement tellement j'avais l'impression que ça ne savait pas ou ça allait. Pas de structure refrain/couplet (ce qui ne me dérange pas en soi mais à condition qu'il y ait une structure en différente en plusieurs parties ou "mouvements"), aucun rythme fixe, aucune vraie mélodie, énormément de dissonances... Une sorte de foutoir, de "pot-pourri" pour reprendre le titre de la dernière chanson de l'album. Mais pourtant, je sentais qu'il y avait quand même que l'artiste avait un réel talent et que son oeuvre n'était pas expérimentale seulement pour l'être contrairement à certains titres du White Album des Beatles ("Wild Honey Pie" et bien sur "Revolution 9") ou à plusieurs chansons de prog quelques années plus tard. L'originalité de certains passages m'a même rappelé certaines oeuvres de Gershwin ou de Bernstein... Je restais donc très partagé.
Mais bizarrement, au fil des écoutes, j'ai commencé peu à peu à apprécier le style unique de l'artiste et à entrer dans l'univers très spécial de l'album. Je considère plutôt aujourd'hui cet album comme une sorte d'exercice de style, ce qui n'est pas si étonnant en sachant que Van Dyke Parks se dit influencé par le courant surréaliste. Et je pense que c'est la clé pour comprendre l'album. Les paroles habilement écrites et parfois humoristiques m'ont parfois rappelé certaines oeuvres de Louis Aragon, André Breton ou de Paul Éluard. Plein de petits détails aux inspirations surréalistes lui confèrent un charme unique. Je note par exemple la chanson "Van Dyke Parks", dont les crédits sont "Public Domain", et la chanson qui suit, "Public Domain", créditée à "Van Dyke Parks". L'album regorge de détails de ce genre...
Et puis comme l'a souligné Vincent de Lavenne dans sa critique de l'album, on s'aperçoit d'un détail nouveau quasiment à chaque écoute si bien qu'on a parfois l'impression de n'avoir jamais entendu des pans entiers de l'album.
Le gros point fort de l'album est selon moi le premier titre, une reprise de "Vine Street", chanson écrite par Randy Newman. Et même si j'adore la belle voix grave de Randy, je dois avouer que la version de Van Dyke Parks surpasse largement l'originale. L'orchestration complexe qui s'ajoute au piano rend la chanson encore plus belle...
Ma seule interrogation qui subsiste est l'instrumental "Donovan's Colours" qui est censée être une reprise de la chanson folk "Colours" de Donovan alors qu'elle n'a strictement rien à voir...