La virgule de trop
Dinos nous avait habitué à prendre son temps avant de sortir ses albums, mais les choses changent. Le premier, Imany, ne sortira que 2 ans après avoir été annoncé, vient ensuite le sublime Taciturne...
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le 2 déc. 2020
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Porté par un freestyle Booska Stamina absolument démentiel, la hype autour du 3ème projet de Dinos est au plus haut. Imany, son premier album à la construction chaotique avait convaincu et étonné par son glow up global en tant que rappeur et artiste. Taciturne, arrivé beaucoup plus rapidement qu'attendu nous avait confirmé qu'on observait l'émergence d'un nouveau poids lourd du game, Stamina, se devait ainsi d'être l'album de la consécration.
Comme sur Taciturne, Dinos commence son album par un son très rap, avec des thématiques froides qui permettent de comprendre l'évolution d'esprit de l'artiste entre les deux projets. Avec une prod de Twinsmatic avec qui il avait déjà travaillé sur le très efficace Seven O clock, Dinos commence parfaitement son 3ème album.
L'enchainement est sublime puisqu'on peut deviner à travers le "feu, feu, feu" qui suit qu'on a le droit à un premier feat surprise avec la présence de Nekfeu pour un passe-passe extrêmement efficace. On savait l'auteur des Etoiles Vagabondes brillant sur l'exercice, on y entend un Dinos toujours aussi technique pour concurrencer Alpha et Freeze pour le titre du featuring de l'année.
Vient ensuite le banger Paranoiaque, qui nous rappelle à quel point Dinos peut sortir des couplets très rap et parfaitement se compléter sur des refrains autotunés presque métalliques dans leur sonorité. On le sent d'ailleurs sur quasiment l'ensemble du projet, les prods de Ken&Ryu sont toujours aussi efficaces et variées au service d'un Dinos qu'on sait particulièrement exigeant et difficile sur ses choix de prods.
Maman m'aime et Prends soin de toi marquent quelque peu le pas mais restent solides. On retrouve un Nosdi Shelby introspectif, exprimant ses blessures et parfaitement secondé par Da Uzi sur le second son.
Je Wanda qui a tout d'un son calibré pour Skyrock s'écoute bien et nous maintient en haleine sur le projet au contraire de Césaire dont on ne comprends pas le choix d'un titre aussi fort pour in fine un son assez zumba et plutôt dispensable.
Demain n'existe plus, mélodique de fou, presque planant, et très mélancolique nous offre un Dinos qui s'épanche sur ses relations amoureuses et les blessures profondes qu'il continue à porter, conscient de son propre rôle dans cet échec: "L'amour devrait être remboursé par la sécurité sociale" "Elle m'dit je t'aime, j'lui dis qu'ça passera, J'lui demande de quoi t'as peur? Elle m'répond j'ai peur de toi" Autre apparition surprise qui suit, un Leto dans sa zone de confort mais qui complète parfaitement Dinos sur le Nord se souvient.
Corbillard, sorte d'interlude à la Franck Ocean dans Taciturne fait quelque peu tâche, comme souvent dans les projets du natif de la Courneuve qui a tendance à avoir du mal à sélectionner/jeter des morceaux (cf. les Inachevés sur la réédition de Taciturne).
Dernier artiste surprise, Zikxo, qui sans sortir le meilleur 16 de sa carrière nous fait bouger la tête et kiffer sur Judas. Au final, c'est le seul featuring annoncé de l'album, et particulièrement attendu tant les auteurs de Logiciel Triste et Helsinki devaient se rencontrer qui déçoit. L'alchimie Laylow/Dinos ne prend pas chez moi et donne l'impression qu'on est passé à côté d'un classique.
13ème et avant dernier son, Madone, qui répond à Helsinki (Imany), CoeurJacking (Taciturne) puisque pour la première fois dans sa discographie, Dinos semble "heureux" en amour, presque persuadé qu'il a enfin trouvé la bonne personne. Au point d'évoquer pour la première fois l'envie de paternité, et rappelant qu'il se rapproche doucement mais sûrement de la trentaine. On le sent, on le devine, Dinos n'est plus ce jeune rookie des RC et son évolution en tant qu'homme se sent à mesure qu'on écoute Stamina,.
Le projet se termine avec un son teasé depuis un moment par Nosdi, 93 mesures, annoncé comme le successeur en mieux de Quand les Cailleras Prient. Track coup de poing sublimé par l'incroyable Sofiane Pamart , 93 mesures donne la chair de poule et nous convainc que Stamina, est bien le meilleur album du natif de la Courneuve. A noter, dans le contexte du 26 novembre, marqué par la révélation d'un énième scandale de violence policière , l'incroyable "Un peu innocent, un peu coupable, chaque contrôle de police me rapproche de mon feat avec 2Pac" .
A travers Stamina, Dinos évolue en tant qu'artiste, en tant qu'homme et cet album est effectivement, comme annoncé, celui d'une maturité toujours plus affirmée. Toujours aussi buté par le rap dont on sait qu'il en a une culture encyclopédique, Dinos est un artiste qui connaît les codes, ses classiques mais arrive à évoluer dans un univers du rap toujours plus hybride, complexe et dans lequel le moindre faux pas est interdit. Dinos n'a jamais semblé aussi proche à travers Stamina, de ses ainés et modèles tout en étant de plus en plus installé dans le paysage actuel rapologique.
La virgule et la fâcheuse tendance de Nosdi à user jusque la moelle le marketing nous laisse penser qu'une réédition/partie 2 arrivera sous peu. Ce qui est une bonne nouvelle puisqu'on aura notre Booska Stamina sur les réseaux. mais c'est aussi une stratégie qui nous empêchera de simplement profiter d'un projet en tant quel tel, puisqu'on attendra déjà les sons bonus, les prochains moves de SPKTAQLR pour sa pépite arrachée à Def Jam il y a déjà plusieurs années.
Pourtant, ces 14 titres sont largement suffisants pour savoir que Dinos est désormais un acteur incontournable qui aura marqué une époque en étant un rappeur capable de synthétiser ce qui fait de mieux dans le rap en 2020.
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Créée
le 27 nov. 2020
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pas eu d'étincelles ou de gros kiff général comme taciturnes mais bon album
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