Sur écoute par Christophe Mrr
Jamais une série n'aura engendrée telle unanimité sur sa qualité. Au point de voir en ses détracteurs des déviants, n'ayant pas compris le sens et cheminement de celle-ci. Cette oeuvre ne laisse pas indifférent, son histoire ne nous le permettant pas.
Il faut dire que The Wire ne se consomme pas de la même façon qu'une série qu'on peut regarder tout en ayant d'autres occupations. La série de David Simon demande un effort colossal de la part du spectateur. Celui-ci ne peut la poursuivre sans être passionné, intrigué par cette fresque gigantesque. Car The Wire est surement l'une des oeuvres les plus ambitieuses que la télévision ait fait naitre. Pourtant,, dans les faits, les critiques négatives mettent en avant le manque d'action, décrivent une "série ou il ne se passe rien". Les amoureux de The Wire répondent alors que c'est dans cet aspect que la série se démarque et devient culte.
En effet, loin du rythme effrené des networks américains, on a le sentiment de regarder un long documentaire de plus de cinq saisons. Une immersion dans la ville de Baltimore à travers les yeux de ses citoyens. Du dealer au "street-level" au maire de la ville, tout le monde y passe. Les actions de l'un peuvent mettre 3 épisodes de 55 minutes a avoir des conséquences sur un autre, mais pourtant rien n'est laissé au hasard. La richesse des personnages est évidemment l'atout majeur de The Wire. Chacun a un rôle à jouer dans cette ville, chacun a sa particularité, le "shiiiiiiit" du sénateur Clay Davis est ainsi rentré dans la postérité. De même que cette scène culte ou de jeunes dealers apprennent les règles des échecs à leur façon.
Tous les personnages participent donc à cette mosaique qu'est la ville de Baltimore qui finit par voler la vedette aux multiples personnages. Baltimore est visualisée dans tous ses aspects. Une véritable sociologie urbaine qui se focalise sur des interactions à la fois inattendue et cependant logique dans l'engrenage de la ville. Ainsi, le trafic de drogue et son appréhension par les autorités restent les fils rouges du tableau dépeint par The Wire. Toutefois, les saisons 2, 3, 4 et 5 nous offrent également des points de vus neufs. La saison 2 s'intéresse par exemple aux dockers et à la misère sociale qui s'abat sur ceux-ci. La saison 3 nous conduit dans les coulisses de la politique de Baltimore. A travers arrangements, chiffres de la criminalité trompeurs, pratiques informelles dont on a tous conscience mais dont on avait rarement senti un tel goût de réalité. La saison 4 nous plonge dans le système éducatif de cette ville de l'est des États-Unis. Enfin, la saison 5 s'intéresse à la presse, de façon moins poussée qu'on aurait pu l'espérer, mais encore une fois d'un point de vue novateur. Les personnages rencontrés dans chaque saison ne sont pas oubliés dans la suivante, au contraire, la série s'enrichit de ses -parfois trop- nombreuses interactions. Au point de se priver pendant toute une saison de son personnage le plus vu jusque-là dans l'avant dernière saison.
Malgré ces quelques défauts, The Wire est de fait considerée comme la série la plus aboutie de tous les temps. Devant des chefs-d'oeuvres comme Six Feet Under, Oz, The Sopranos, Breaking Bad ou encore Twin Peaks. Elle ne s'adresse pas à tous, mais se présente comme un "must-see" pour un sériephile à la recherche de noirceur, en quête de réalisme.