La vie d’artiste est loin d’être aussi belle que ce que l’on pourrait penser. Le travail de l’ombre afin d’acquérir la notoriété suffisante pour promouvoir sa musique est immense, et ne paie d’ailleurs pas toujours. Puis, quand enfin la notoriété est présente, il faut jongler entre des plages horaires immenses, des tournées à travers le monde (pour peu que l’on soit un artiste international) nécessitant des transports quotidiens, une hygiène de vie souvent en dehors des clous, sans compter l’énergie dépensée durant les lives. A tel point, que certains en perdent le plaisir de composer de la musique. Et j’exagère à peine.
Avicii connait cette vie. Lui, qui dès 2010 sous le doux nom de Tim Berg dans un premier temps, est sorti de l’ombre avec le titre Seek Bromance. Puis Levels arriva. Ce titre utilisant un sample vocal de la géniale Etta James va faire basculer la vie du jeune suédois, à l’époque âgé de 22 ans. Une collaboration avec David Guetta sur Sunshine, puis Nicky Romero sur I Could Be The One ont suffit à placer Avicii parmi les producteurs les plus suivis et attendus, jusqu’à la sortie en 2013 de True, son premier album. Alors que beaucoup s’attendaient à une compilation de tubes comme malheureusement nous proposent trop souvent les producteurs électro, le suédois va prendre tout le monde de court, et met sur pied un projet cohérent, tourné vers une déclinaison de titres voix/guitare, mélangés à des sonorités électroniques ; Wake Me Up pour le côté Soul, Hey Brother pour la Country, Addicted To You pour le combo voix féminine/mélodie mélancolique et Lay Me Down pour le Funk. Bingo ! Agrémenté de quelques autres titres bien efficaces comme You Make Me, l’album connaît un succès international rarement atteint pour un artiste EDM.
Mais, puisqu’il y a toujours un mais, le rythme effréné des festivals et concerts vont avoir raison de sa santé, et mis au repos forcé durant plusieurs mois. Et musicalement, cette succession d’évènements va se faire ressentir.
Il y a d’abord la sortie du Ep The Days / Nights, 2 titres absolument indigestes, essayant de reprendre les codes du succès des singles de True, l’efficacité en moins, et des featurings vocaux en deçà (pouvait-on attendre mieux de Robbie Williams en même temps ?).
Stories, le second projet d’Avicii, pour lequel, de son propre aveu, près de 70 productions ont été faites, retombe malheureusement dans les travers des albums électros cités plus tôt. Peu ou pas de cohérence entre les titres, un manque d’inspiration et de créativité assez visible, et, pire, très peu de singles potentiels. Waiting For Love, le premier extrait, est d’une banalité affligeante ; d’ailleurs, en comparaison aux singles de True, le succès de ce titre a été relativement décevant. Des titres comme Broken Arrows, City Lights, Trouble et bien d’autres, nous donnent le sentiment que Tim a manqué cruellement d’imagination, recyclant à foison les recettes du premier album. Même certaines tentatives de nouveautés comme Can’t Catch Me ou Somewhere In Stockholm tombent à plat par des productions pauvres et sans relief. Quelques petites réjouissances cependant telles que Touch Me et sa vibe funky assez sympathique, ou For A Better Days et ses notes de piano efficaces, mais là encore, pas de single potentiel, et rien de très accrocheur qui nous ferait appuyer sur la touche replay.
Stories déçoit considérablement. L’artiste nous ayant gratifié de titres bien produits, de sonorités efficaces et d’un premier album maîtrisé et homogène, nous propose un second album à la limite de l’acceptable, n’ayant que très peu d’intérêt dans son ensemble, et ne regorgeant d’aucun titre nous faisant bondir de notre siège. Est-ce cette nouvelle notoriété le contraignant à être sur les routes toute l’année qui aurait altéré ses talents de compositeurs ? Ou alors True n’était qu’un mirage, un cache misère alors qu’aujourd’hui se révèle un artiste relativement différent (et désolant) ? Quel dommage que le suédois ayant amené une vraie vague de fraicheur il y a deux ans, dévoile un projet réchauffé et prévisible.