Avouons-le tout net, il faut sans doute être japonais pour apprécier (ou ne serait-ce comprendre) pleinement ce disque d’OOIOO. A moins de boire un demi-litre de saké…Oublions. Et admettons que certains délires de folklore tribal de ces quatre filles loin de l’image de la japonaise à couette nous laisseront étranger. Taiga est un album qui n’est pas fait du même bois. Vraiment pas… Ou sinon, d’une matière totalement inédite. OOIOO mixe ensemble le folklore nippon avec flute et percussions traditionnelles, des rythmiques que l’on imaginerait dans l’African beat (Fela goes Japan ?), le rock new yorkais de Télévision (…version NHK) et un jazz de film noir. Tous ensemble, plus ou moins ensemble ou séparé, plus ou moins fortement dosé. Les morceaux sont en permanence « work in progress » comme une musique progressive (j’emploie ce terme à dessein car il y a d’ailleurs des sons de guitares tout droit d’album de Yes et King Crimson !) qui ne serait plus structurée mais laissée à sa libre expression.
Pas facile de s’y retrouver et de ne pas être un peu fatigué à la longue par les voix incantatoires et stridentes de ces japonaises. On peut essayer de danser ça et là (Uja), au risque de finir en transe (point positif) ou de rendre son déjeuner (point négatif). OOIOO trouve sur un titre le bon melting pop, ce que pourrait donner au mieux leur musique. Sur Sai, les percussions sont seulement utilisés comme tapis (et donc pas trop envahissantes) et le groupe arrive à petit à petit muer les guitares rock en cuivre jazz. Comme du Sonic Youth qui serait devenu du Miles Davis ou Leonard Bernstein. Oui celui de West Side Story. Avec elles, tout est possible et l’on n’est pas étonné quand une chanteuse entonne un chant qui pourrait être issu de cette comédie musicale (mais version « coup dans le nez »…faut pas déconner). On n’a pas tous les jours l’occasion de vivre une expérience. Et ce disque de OOIOO en est une !