Après Headhunter, son album le plus heavy, Krokus change son fusil d’épaule pour livrer un disque de hard rock, avec quelques touches heavy rock très américaines, dues à la production de Bruce Fairbain qui essaie d’inscrire le groupe dans la vague en provenance d’outre-Atlantique. C’est assez évident sur « Midnite Maniac » dont le refrain possède d’indéniables influences glam, alors que les arrangements sont très hard FM. Ce titre, qui sort en single, est destiné au marché américain, comme le clip qui rend hommage aux films de gangsters. On n’est donc pas étonné de retrouver une reprise du « Ballroom Blitz » de The Sweet, un groupe dont le répertoire est allégrement déterré par des formations cherchant à refaire le coup de Quiet Riot avec le « Cum On Feel the Noize » de Slade. Le clip tourné pour ce titre est clairement américanisé avec ses cohortes de filles se jetant sur la voiture des musiciens.
Ces tentations américaines se traduisent aussi par la co-écriture de « Boys Nite Out » avec Bryan Adams et Jim Valance, mais aussi par l’apport de chœurs AOR sur « Our Love », un tempo médium qui s’inscrit dans la vague MTV et lorgne du côté de Def Leppard. Certaines chansons essaient de séduire ce marché juteux qui se nourrit de formation hard FM depuis quelques années. C’est notamment le cas de « Hot Stuff », aux arrangements typiques de l’AOR ou le très FM « Out to Lunch », dont les bases hard rock sont arrondies. Les ambitions étant clairement affichées, après la tournée américaine en première partie de Def Leppard (dont ils se sont fait virer), puis de Judas Priest et les concerts donnés dans des salles de moyenne capacité. Sans doute que le groupe avait pris conscience que son heavy metal était trop puissant pour ce public.
Certains morceaux restent néanmoins ancrés dans le hard rock proche d’AC/DC comme le rapide et groovy « Out Of Control » qui pulse bien et nous prouve que Krokus est toujours un groupe de hard rock. Il en va de même pour le binaire « Ready to Rock » qui affiche d’emblée ses ambitions. En revanche, l’alerte « Rock the Nation », dont on aurait pu attendre davantage de folie, est adouci par un refrain moins agressif que d’habitude et des chœurs heavy rock. On est loin de la puissance de titres comme « Eat The Rich » ou « Ready To Burn ». Les crocs de la bête semblent avoir été limés. Cela ne veut pas dire que ces chansons soient mauvaises, mais elles tranchent réellement avec ce que les Suisses nous ont livré quelques mois plus tôt.
The Blitz est un bon album, mais qui se situe à des années lumières de son prédécesseur et qui marque un net changement de direction musicale. A nouveau, le groupe va partir en tournée aux Etats-Unis, cette fois avec Accept et Rough Cutt, pour ensuite participer au Texxas Jam Festival.