Malgré que "Back in Black" d' AC-DC et "Thriller" de Michael Jackson soient devant "The Dark side on the moon" en terme de vente, je pense que pour tous, cet album resteras THE album. Celui qui pourrais représenter la définition, la grandeur que ce mot représente réellement dans la Musique, dans une époque où l'on accorde plus d'importance aux singles qu'aux objets dont ils sont sortis. D'ailleurs, est-ce vraiment un album dans le sens classique du terme ? A son écoute, il semble évident que non. C'est autre chose. Quelque chose de phénoménal dont nous sommes témoins. Et ce que ça a été, au final, on ne le sauras jamais vraiment, ni les auteurs ni nous. Ce fut une foudre de génie, qui a mué en ticket pour l' Infini.
L'album est d'ailleurs quasi un être vivant, avec ses battements de cœur comme introduction et conclusion ! Un sample d'extraits du disque (une idée plus qu'un titre signé Mason), qui met tout de suite dans le bain. On s'y trempe au fur et à mesure, doucement... et puis, "Breathe" nous aspire dans son eau galactique. Sur un texte philosophique intelligent, avec une mélodie extra-terrestre qui sera récurrente sur toute la face A, Pink Floyd impose une atmosphère dont seuls les académiciens peuvent rester insensibles. "On the Run" est pour moi quand même leur point faible: j'aime bien, mais sans plus. Trop répétitif. L'audace est tout de même à saluer. Explosion de la course (un peu à la manière de "In the Flesh ?" sur "The Wall"). Place aux horloges ! Cela aurait pu être une idée parfaite si le son, bien qu'irréprochable sur tout le disque, aurait gagné à être un peu diminué sur la grande sonnerie... "Time", qui est souvent la chanson la plus appréciée de l'album, est d'ailleurs la dernière chanson concrètement Pink Floyd (signé à 4, quoi). Pour ce requiem inconscient, ils se donnent à cœur joie dans le mysticisme. Avec un solo de guitare qui compte parmi les plus beaux de Gilmour, et de l'histoire du rock tout court. La reprise de "Breathe", qui surprend agréablement, est nettement moins optimiste que son prédécesseur. Cela joue comme une transition parfaite avec "The great gig in sky"... tant que j'y suis, inutile de dire que les transitions sont parfaites, rien n'interromps vraiment le voyage. La chanson entièrement signée Richard Wright (et certainement sa meilleur contribution solo, avec "remember a day"), est un chef d’œuvre total. On touche la Mort du bout des doigts. Que ce soit l'intro au piano, l'ensemble du groupe, la soliste, l'agonie finale, tout est splendide. On passe à "Money", l'un des très rares tubes du Floyd. Et il m'a toujours chiffonné pour sa place sur ce disque: il ne correspond pas à l'ambiance générale ! Pourquoi sur ce disque-là et pas un autre ? Avaient-ils pressentis le succès ? Ce serait possible, puisque le son est plus accessible. Et rarement accessible et extase auront aussi bien fonctionné ensemble ! Pour un texte tout de même un peu bêta, la voix de Waters se prête à merveille sur cette mélodie toute simple et géniale. Le solo de saxophone est superbe, mais c'est rien à côté de celui de Gilmour... Jouissif comme un orgasme géant, un des plus beaux moments du rock, encore. "Us and Them" est envoûtant. Pour parler de guerre, ils choisissent la douceur de la dénonciation triste comme opposition. De nouveau un grand tour de force. "Any colour your like" est très spécial, à mon avis il se savoure vraiment lorsqu'on a pris des substances pas super légales, mais l'improvisation de Wright lié à celle de Gilmour forme un duo jouissif. A noter que j'ai pas compris la mini-intervention vocale, complètement inutile... "Brain Damage", qui vas être la première pierre d'une longue chaîne d'hommages à Syd Barett. Le texte est pour le coup magnifique (I'll see you on the dark side of the moon est le seul vers anglais au monde qui a réussi à m'émouvoir !), autant que la musique qui a tout ce qu'il y a de plus solennel et planant. Transition cette fois sur des coups de batterie: ça sent la fin. Déjà ? "Eclipse" est le Bilan avec un grand B. De la Vie. De l'Homme. De l' Univers. Et au fur et à mesure, le groupe nous ramène tranquillement sur terre... Les paroles sont des énumérations existentielles, la musique est progressivement puissante. Jusqu'à ce que tout se meurt d'un coup. L'album meurt. C'est nous qui le ferons revivre en le réécoutant.
Jamais une icône aura autant réunis les critiques et les ventes sur un même accord positif. La beauté brut. Absolument incontournable.