Otis, celui qui me l’a fait découvrir c’est Walid, mon meilleur poto, mon gars sûr.
Et depuis, Otis, c’est mon ami.
Walid disait toujours « Otis, c’est le roi, fréroooo ! C’est le soulman sensible, celui avec un coeur, pas juste une teub ».
Je répondais« Ah ouais ? »
Walid disait « Ouais »
Walid, c’était un peu mon héros.
Il a vécu pendant longtemps dans la baignoire de l’appartement quand mon père l’a ramené pour l’Aïd.
Au bout de 3 mois, ma mère ne cessant de traiter mon daron de lâche à coups de « C’est pas moi qui vais l’égorger, ta bestiole ! », le paternel prit son courage à deux mains et décida de le libérer.
De toutes les façons, c’était fini, l’Aïd.
Mais Walid, la liberté, t’as vu, il l’avait déjà dans sa tête. Et puis, il était tellement habitué à nous qu’ il est resté en bas de l’immeuble. Quand il nous voyait sortir, ma mère, le lâche et moi, il nous bêlait.
Avec Bogdan à l’accordéon, on avait monté un groupe de Bluegrass spécialisé dans les covers de PNL. C’est te dire si on aimait la poésie et la musique combinées.
Walid, il était à la batterie car il était trop moche pour être devant. Moi je chantais et je jouais tout ce qui se gratte. Guitare, Banjo, couilles.
Walid me disait : « Chante-la comme Otis, mets ce petit souffle de rocaille sur ta voix »
Je répondais : « Je sais pas si Béné se prête à tenter d’imiter... »
Il coupait ma tentative d’esquive.
« Faut pas avoir peur, petit. Tu crois qu’il avait peur, Otis ? Regarde, ma chanson préférée c’est "Mary’s Little Lamb" . C’est une comptine, ma gueule. Et pourtant...
Quand tu fermes les yeux, soudain, t’es au bal.
T’es sapé comme un milord, t’as mis du sent-bon, t’es venu là pour pécho. Ça tombe bien, là, au fond, t’as une Lison en ligne de mire et tout plein de passes dans ton pantalon pour lui en mettre plein les mirettes. Pas pour danser avec elle, c’est avec Otis que tu danses ! Otis c’est un magicien. Sa voix, c’est comme des cailloux à polir la peau de tes oreilles. Otis, ça sert à mieux entendre.
Otis, il s’est envolé pour jamais plus redescendre. Depuis, c’est une étoile. Le soleil, je crois. »
Avec Bogdan, qu’avait commencé à creuser un trou, il nous a tellement saoulés qu’on l’a fait cramer en méchoui.
J’aime pas qu’on m’explique, surtout quand c’est un putain de mouton.
La bise.