"To be loved, one must return love."
Nous sommes en 1975. Les dinosaures du rock, comme Pink Floyd ou Led Zeppelin, sortent leurs albums les plus mythiques, comme Wish You Were Here et Physical Graffiti, Queen envahit les ondes radio...
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Nous sommes en 1975. Les dinosaures du rock, comme Pink Floyd ou Led Zeppelin, sortent leurs albums les plus mythiques, comme Wish You Were Here et Physical Graffiti, Queen envahit les ondes radio avec son méga-hit planétaire qu'est Bohemian Rhapsody, sorti sur A Night at the Opera, tandis que d'autres groupes signent d'autres disques certes moins connus mais tout aussi bons. On peut citer Supertramp et son Crisis? What Crisis? ou... Camel et The Snow Goose, qui fait l'objet de la présente critique.
Putain! vous direz-vous, il fallait oser à l'époque, faire un album entièrement instrumental, juste après un disque à succès (l'excellent Mirage)! Ben oui, vous répondrai-je, mais au final, cette décision est compréhensible vu les nombreuses critiques au niveau du chant, mais pas du tout regrettable, car cet album s'en tire parfaitement (pas autant que Mirage, mais quand même!) malgré cette absence notable. Actuellement, la plupart des artistes se râperaient la gueule sur deux kilomètres en sortant des disques totalement instrumentaux, peut-être pas au niveau de l'accueil critique, en tout cas commercialement, tellement la musique d'aujourd'hui est dépendante de la structure vers-refrain.
Mais de quoi parle The Snow Goose? À en juger la couverture, on dirait un conte pour gosses (si vous omettez le logo de la marque de clopes, évidemment!), et pourtant, non, c'est basé sur l'éponyme histoire de l'écrivain américain Paul Gallico (celui qui a écrit l'Aventure du Poséidon), que j'ai lue juste après la première écoute. L'histoire de base est géniale et d'une profondeur émotionnelle vraiment touchante, et le travail de notre ami chameau ici ne fait qu'embellir cette œuvre un peu oubliée (en tout cas sur Senscritique!).
Ici, plus de morceaux de 10 minutes, il n'y a que des pistes courtes et conceptuelles qui font honneur aux sections de l'histoire. Tout commence par The Great Marsh, est une introduction qui dépasse n'importe quelle ouverture à un album-concept: ça fait bien le travail tout en valant une piste à réécouter individuellement. Ce n'est certainement pas le point fort du disque, mais l'atmosphère du récit y est extrêmement bien rendue, rappelant sans problème l'environnement froid et humide d'un marais plongé dans un brouillard hivernal. Le lent ostinato de Peter Bardens au clavier ainsi que les choeurs miroitants ne font qu'ajouter au mystère, avant de plonger sur une discrète intervention de l'orchestre et la batterie d'Andy Ward. Le morceau suivant, malgré ses trois minutes, est peut-être le chef-d'œuvre de The Snow Goose, j'ai nommé Rhayader. Oh, j'ai rarement écouté un morceau aussi mélodieux que celui-ci, tout y est absolument parfait! La flûte du guitariste Andy Latimer joue un air, simple mais ô combien harmonieux, tellement beau, tellement engageant qu'il vous donnerait l'envie d'apprendre à jouer cet instrument. Philip Rhayader (c'est le protagoniste du livre) reste avec nous pour la piste successive, qui, cette fois, donne un beau cadeau aux fans de Mirage (dont je fais partie): Rhayader Goes to Town. Cette intro avec ces rapides ostinati de claviers est extrêmement bien réussie, mettant en place des sonorités légèrement hard renouant avec celles de leur album précédent (où l'on retrouve notre batteur Ward dans toute son agressivité et sa puissance), alternant ci et là entre passages dramatiques et passages plus lents qui permettent à Latimer de développer un jeu de guitare plus émotionnel, moins agressif, un peu plus gilmourien, qui caractérisera le futur Camel. Les deux chansons d'après, Sanctuary et Fritha servent essentiellement d'intermède à une autre pièce maîtresse de l'album, The Snow Goose, bien que la deuxième nous propose quelques harmonies vraiment apaisantes. La plage titulaire est une autre vitrine pour Latimer, qui délivre des parties de guitares calmes et vraiment touchantes, accompagnées par des claviers majestueux et une batterie lente mais essoufflée qui, je trouve, confèrent à ce morceau un feel un peu Pink Floydien. Puis, que dire d'autre sur cette charmante clarinette qui s'invite sur Friendship, sur ce staccato amusant? Ou sur ces parties vocales sans mots sur Migration, qui rappellent avec enthousiasme celles sur Slow Yourself Down, où l'on pourrait parfaitement imaginer l'oie du récit traverser une tempête dans une ambiance joyeuse quoique légèrement inquiétante? Camel commence ici à dévoiler une plus grande partie du style basé sur les ambiances qui caractérisera d'autres albums comme Moonmadness ou Rain Dances. Ensuite, c'est la mélancolie qui s'invite au tableau dans les notes de guitare clairsemés dans Rhayader Alone, avant de repasser sur une alternance très bien réussie entre passages dramatiques et joyeux typiquement cameliens sur Flight of the Snow Goose, encore une fois, donnant hyper bien l'impression de voler aux côtés de l'oie protagoniste dans les nuages. Après cela, les moments marquants de l'album, comme la clarinette de Friendship, les ostinati et les choeurs de The Great Marsh, s'invitent pour former l'introduction de Preparation, qui divergera ensuite sur ce staccato inquiétant et absolument répétitif, pour moi, pas trop plaisants et un peu ratés. Ce qui n'est pas raté, en revanche, c'est la piste subséquente, Dunkirk, qui, un peu comme Rhayader Goes To Town, est une excellente chanson même sortie de son contexte. C'est vraiment un long et solennel crescendo, parsemé ci et là d'éléments symphoniques ou de marche militaire, tout en proposant ces licks de guitare calmes et héroïques. L'outro est d'une intensité émotionnel dévastante, représentant extrêmement bien la vivacité des opérations de Philip Rhayader, qui est allé sauvé des soldats britanniques sur les plages de Dunkerque et qui finiront bien par prendre sa vie. Le deuil que représente sa mort pour la jeune protagoniste Fritha est surtout mis en lumière dans le triste et mélancolique Fritha Alone, car Epitaph revient avec le même staccato un peu chiant de Preparation, faisant office d'un... ben d'un épitaphe. Après c'est la joie qui revient dans La Princesse Perdue, où la symbiose rock symphonique atteint son apogée, avec des mélanges harmonieux entre claviers et synthés et orchestre philharmonique pour enfin donner l'outro qui reprend le thème principal du morceau titre. La véritable conclusion de l'album est une reprise de The Great Marsh, concluant le récit dans la même ambiance par laquelle elle avait démarré: ce froid et humide marais mystérieux qui le restera sûrement ainsi pour le restant de ses jours...
1) The Great Marsh (8/10)
2) Rhayader (10/10)
3) Rhayader Goes To Town (10/10)
4) Sanctuary (6,5/10)
5) Fritha (7/10)
6) The Snow Goose (9,5/10)
7) Friendship (9/10)
8) Migration (9/10)
9) Rhayader Alone (8/10)
10) Flight of the Snow Goose (9/10)
11) Preparation (6,5/10)
12) Dunkirk (10/10)
13) Epitaph (6/10)
14) Fritha Alone (8,5/10)
15) La Princesse Perdue (10/10)
16) The Great Marsh (7/10)
(Le morceau en gras est mon morceau préféré du disque)
Pour conclure, The Snow Goose est une somptueuse mise en musique du conte éponyme de Paul Gallico, possédant de nombreux moments de gloire, comme Rhayader, Rhayader Goes To Town,Dunkirk, La Princesse Perdue ou la plage titulaire, remplis de belles et émouvantes mélodies qui compensent plus que largement le "manque" perçu de paroles. C'est peut-être cela qui fait sa force après tout.
9/10
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