Peel slowly and see
"Il n'y a peut-être eu que 10 000 personnes à avoir acheté le disque à sa sortie, mais elles ont toutes formé un groupe". (Propos prêtés à Brian Eno) On peut passer, assez rapidement, sur les...
Par
le 11 nov. 2013
44 j'aime
7
un album problématique pour moi
d'un côté, il y a cette atmosphère magique dans Sunday Morning, ce story telling organique dans Waiting for the Man, cet orgasme et ces paroles magnifiques dans Heroin, ce refrain léssivé dans Venus in Furs, comme si l'album dans son entièreté avait été enregistré après un trip collectif et qu'au lieu de dormir, ils avaient décidé d'aller dans le studio
mais justement, tout sonne très fatigué, jusque dans la qualité sonore, très ombragée
c'est pas un album très réussi musicalement, à vrai dire
et son statut quasi immortel me hérisse les poils, on l'écoute comme un album qui a traversé le temps et qui est devenu intouchable, je ne nie pas que c'est autant un album de son temps qu'un grand album sur les prémisses de l'âge adulte, sur la souffrance sentimentale, et sur les expériences limites, comme un recueil de nouvelles sur les années 60 et les sables mouvants de l'époque
mais chacun en fait un peu ce qu'il veut aujourd'hui
ce n'est pas tellement la musique qui compte, mais plutôt ce que représente l'album, ce qu'il incarne dans la tête de beaucoup de gens
et du coup, on se permet de dire pas mal de conneries et de contre-vérités en toute légitimité
(ou on s'en sert comme prétexte pour jouer de la merde en disant que c'est arty, " c'est très versé "extrême" comme le velvet tu vois" "roh oui carrèment, j'adore ce groupe, surtout leur album avec la banane, là" "oui mais les autres sont pas mal non plus tu sais" "ah non je connais pas ce qu'ils ont fait après, c'est bien?" "oui oui c'est encore plus intense, tu verras" "ouais j'écouterais" (et ça saute)
c'est problématique pour moi car je ne sais jamais sur quel pied danser pendant l'écoute, mais après tout, c'est aussi ça, un album "culte", un album qui appartient à tout le monde et qui est encore vivant dans le coeur de beaucoup de personnes
et ça ne sera jamais complètement fini
let it be, I guess
(peut-être que je suis trop jeune aussi, je sais pas, peut-être que ce modèle de vie n'est pas le mien . Mais c'est ce côté "art contemporain auto-suffisant qui se veut tout sauf accessible par principe", quelque part dans le processus je me sens trahi et isolé, je sais pas comment l'expliquer, c'est pas un album qui est censé avoir un large public, et qu'il soit aussi universellement adulé maintenant, je trouve qu'il y a un côté louche, arriviste, enfin vous y êtes pour rien, moi aussi j'ai dit et écrit la phrase incontournable de tout mélomane amateur, comme quoi le Velvet est le groupe le plus influent du monde, c'est strictement invérifiable et très magazino-bien-pensant de mettre dans la tête du public que Lou Reed est un poète qui n'a pas besoin de savoir chanter, je sais pas pourquoi je m'énerve, ils sont tous quasiment morts de toute façon, enfin si vous voulez écouter quelque chose de vraiment subversif venant des années 60, écoutez les Mothers of Invention, c'est le jour et la nuit dans le Royaume de la Subversion, puis pas besoin de drogues pour être cool, tout est question d'imagination, de création et de travail, chez les Mothers, pas de fringues, merde - non sérieux, j'aime bien le Velvet pourtant hein! c'est juste que je peux pas en parler de manière modérée, ça convoque tellement de chose chez le lecteur, qui est déjà là, toi oui toi, t'es déjà là à comparer ma critique à tout ce que t'as lu avec le Velvet et tu te dis "merde, jamais on ne parle de la musique qu'il y a à l'intérieur de cet album, tout le monde connaît la banane et la porte sur son sac à dos comme une marque", ben moi je te dis : la musique elle est…… PAS MAL, ouais, pas extraordinaire, pas fofolle, c'est juste tout un contexte, toute une époque, toute une galerie de personnages qui font que la musique est quelque chose de plus, quelque chose d'indescriptible, mais crois-moi, tu as le droit de trouver cet album moyen, pas mal, tu as le droit de ne pas l'aimer, mais tu as le devoir d'être modéré sur cet album, car il y a toute une religion autour qu'il faut absolument combattre, faire de la musique ça ne veut plus dire prendre une guitare et mettre de la distortion partout, ça a permis la libération de toute une génération d'artistes au même titre que tout mouvement de libération dans ces années là s'accompagnait d'une poussée et d'une bouffée créatrice, mais aujourd'hui c'est devenu risible -et pourquoi, après tout? pourquoi être aussi cynique? pourquoi tout le monde n'est pas devenu artiste? pourquoi certains gagnent des millions et d'autres sont à la rue? pourquoi le Velvet est-il aimé par tant de personnes? peut-être aussi parce que beaucoup de personnes se retrouvent dans ce côté non-élitiste qu'il incarne à travers sa simplicité, son honnêteté et sa nécessité.)
en tout cas, et pour résumer, ce qui est bien avec cet album c’est qu’il rassemble et divise à la fois.
C’est à dire qu’on peut l'aimer/l'haïr/être indifférent pour :
ce qu'il est/ ce qu'il prétend être/ ce qu'il est devenu,
et on peut très bien, à l'inverse, l'aimer/le haïr ou être indifférent, pour :
les mêmes raisons/les raisons inverses/des raisons différentes
Créée
le 3 mai 2015
Critique lue 1.5K fois
14 j'aime
D'autres avis sur The Velvet Underground & Nico 45th Anniversary
"Il n'y a peut-être eu que 10 000 personnes à avoir acheté le disque à sa sortie, mais elles ont toutes formé un groupe". (Propos prêtés à Brian Eno) On peut passer, assez rapidement, sur les...
Par
le 11 nov. 2013
44 j'aime
7
Je ne sais pas si c'est mon "esprit scientifique" ou mon côté tendance hipster mais j'ai toujours eu une pulsion intérieure m'amenant à renier ce que la majorité loue ou présente comme un chef...
Par
le 23 juil. 2012
32 j'aime
17
La majorité des critiques de cet album se résume à "pierre angulaire du Rock" et à la phrase de l'évangile selon Eno sur les "3 albums vendus (j'ai mis des chiffres au hasard, ils changent...
le 30 déc. 2013
26 j'aime
5
Du même critique
Ya trois ans. C'était dans le petit CDI du lycée. J'arpente les trois étagères remplies de romans. J'ai la tête dans le cul, je viens de me réveiller. La lune est encore là. La pluie bat contre la...
Par
le 30 avr. 2011
56 j'aime
8
Les vagues est un voyage introspectif dont on ne se remet pas. Avec un départ heureux en apparence. Comme lorsqu'on se jette dans l'eau, heureux de retrouver la mer, au début des vacances; on nage...
Par
le 30 juil. 2011
39 j'aime
4
J'ai découvert Cosmos lors de mes études poussées et abracabrantesques de l'univers Zappaien : une interview de je ne sais plus qui à propos de je ne sais plus quel concept flou (mais très...
Par
le 30 avr. 2011
33 j'aime
4