Son nom ne vous est peut-être pas familier et pourtant, elle en a fait des tourner des têtes du haut de ses longues jambes couleur ébène. Il y a un nom qui se détache plus nettement de sa liste de chasse, il s'agit du très talentueux Miles Davis. En effet, en 1967 ils tombent très vite amoureux et décident de se marier un an plus tard, seulement le mariage ne dure pas plus d'un an, ils se séparent en 1969. Miles Davis ne supporterait pas les rapports qu'elle entretiendrait avec un certain Jimi Hendrix, il la soupçonne de le tromper avec le guitariste, il affirma plus tard lors d'un entretien qu'elle était "trop jeune et trop sauvage" pour lui. Leur relation pourtant très courte inspira Miles Davis qui lui dédie en 1970 l'album Bitches Brew «Brouet de Salopes». Bref voilà pour la petite anecdote croustillante, parlons maintenant de l'album.

They Say I'm Different, à l'image de la chanteuse, est cet obscur objet du désir. Sauvage, sensuel, sexuel et surtout, indomptable. Il n'y a qu'à regarder la pochette pour deviner le caractère particulier qui émane de cette oeuvre, on croirait voir une parodie psychédélique de Wonder Woman. Coupe afro et une tenue funky-kitsch sur un corps qui semble parfaitement traduire les moeurs décomplexées de la chanteuse, jambes grandes ouvertes prêtes à accueillir les plus grands plaisirs désenchantés, telle une grande prêtresse castratrice. À l'époque, une grande partie de ses concerts sont boycottés, elle est également privée d'un grand nombre de passages à la télévision américaine, il en est de même pour la radio. Effectivement, son féminisme et son panégyrique pour la très tendre chair n'acquièrent que remontrances et prohibitions, elle passe quasiment inaperçu et ne vend presque rien.

Et pourtant... Dieu sait que son album est une perle. Une perle aux éclats nuancés de toutes sortes de couleurs. Nous retrouvons notamment ce groove explosif propre à la funk. La chanteuse est très nettement influencée par James Brown et Sly and The Family Stone, elle est d'ailleurs une amie très proche de ce dernier (Sly Stone), quelques membres collaborent sur cet album ainsi que le précédent, Betty Davis. Lorsque nous écoutons They Say I'm Different, notre imagination nous pousse à flâner dans des contrées normalement interdites. J'imagine un threesome bestial entre miss Mabry, Hendrix et Sly Stone, l'enchanteresse semble avoir dépouillé, au cours de ce coït aux effluves d'haschisch et d'alcool, tout le rock et le groove de l'un et la voix de l'autre. Tantôt elle rugit, tantôt elle miaule, elle branle toujours entre la dégustation et l'ingurgitation. Orgasme assuré.

On retrouve également dans ces manières et son excentricité vocale, toute la soul d'un Prince mais aussi l'esprit avant-gardiste et novateur d'une Madonna. They Say I'm Different et un album en avance sur son temps, juteux, un album de nymphomane assumée, un album qui sent le sexe. Venez donc par-là, oui... Venez donc goûter au fruit défendu...
Arlaim
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le 17 sept. 2013

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