Honnêtement, je ne suis pas un grand fan des arctic monkeys. Et c'est encore plus vrai que l'album du groupe que j'aime le plus, pour lequel j'ai le plus de plaisir à réécouter encore et encore, à décrypter chaque son, chaque indice, chaque parole, ça soit celui le moins aimé par les "vrais" fan. Ces "vrais" fan, qui vont hurler car ils veulent un AM2, un "Do I Wanna Know?" bis, un album avec des guitares qui crachent et pis la batterie lourde, et puis quand ça explose et que c'est rock et tout... Le problème, c'est que Turner, il en à rien à faire, et il en a tellement rien à faire qui va faire complètement l'inverse. Vous vouliez des guitares saturées ? Bam, quelques guitares claires, des guitares accoustiques, peu de saturation, et c'est tout ! Des grosses explosions de batteries ? Une double batterie Jazz tout au balet et en cymbales ? Oh et puis des claviers, pleins de claviers partout !
Je joue le rôle du débile depuis tout à l'heure, mais il faut comprendre qu'à sa sortie, cet album c'est fait lynché. Violemment même, puisqu'il est considéré presque comme le pire du groupe par les fans, et l'un des meilleurs par les néophytes du groupe. La musique n'est pas la même, mais est-ce dramatique ? Non, vraisemblablement non. Mais ce n'est pas un album que l'on écoute en voiture, cheveux aux vents, avec les lunettes de soleil et la décapotable. C'est un album qui se savoure, qui prend son temps, comme un bon vin. On est en 2022, et seulement certains semblent s'en être apperçu, cet album, à force de le réécouter, on ne veut plus le lâcher. Et... Curieusement c'est plus un roman musical qu'un véritable album.
Le travail de composition est majestueux, ça joue de partout, des petites mélodies ça et là qui foisonnent tout le temps, des petites expérimentations électroniques, des suites d'accords pas simple du tout. Là où le tube d'AM repose sur 2 voir 3 riffs majeurs, le "Tube" de l'album (que je considère être la chanson éponyme et non 4 stars out of 5), propose une suite d'accord du plus bel effet, une ligne de basse groovy et travaillée, des guitares toutes en subtilité (une note est parfois juste ce qu'il faut pour ajouter quelque chose), et une batterie qui n'en fait pas des caisses mais qui parvient à garder le rythme parfaitement. Mais le plus impressionnant, c'est que toute la musique vient englober le texte, qui est l'élément majeur de l'album.
D'aucun dirait qu'Alex Turner surjoue, qu'il n'a pas une "voix", qu'il se contente de dire des paroles sans arrêts, parfois un peu débile, parfois un peu niaises, mais qui n'ont pas vraiment de sens entre elles. Non. Si vous êtes anglophones, je vous conseille cette longue vidéo qui vous expliquera tout en détail sur pourquoi les textes de cet album sont exceptionnels: https://www.youtube.com/watch?v=aiYelYvxRMs
Pour les autres, je la fait courte. Les paroles sont écrites à la manière d'un roman de science fiction, où l'univers se dévoile petit à petit. Turner joue ici le rôle, tour à tour, d'un groom, d'un crooner qui va observer le monde actuel sur son petit hotel sur la lune, ou tout ne devient que jugement, écrans, informations incomplètes ou fausses, et ou la seule chose qui nous rattache au monde devient un écran d'ordinateur. Tout les thèmes sont abordés ici, avec plus ou moins de finesse, faisant référence à Blade Runner, 1984, et d'autres oeuvres de Science fiction plus ou moins connues. L'album est alambiquée car les paroles le sont, et tentent de retranscrire toute la folie dépeinte par Turner, folie du consumérisme, du "tout, tout de suite", des notes à outrances, en se demandant parfois si son propos n'est pas trop radical (commentaire méta si l'on veut).
Enfin bon, il faut le déguster cet album.