Transe-lucide
5.7
Transe-lucide

Album de Disiz (2014)

"Ecrit des bonnes paroles avant d'la prêcher"

Grosse déception pour ce qui aurait dû être l'album rap de l'année, Disiz nous offre une fin franchement moyenne (assumons le : mauvaise) pour sa trilogie "lucide". Après excellent EP "Lucide, le moyen "Extra-Lucide", la dernière galette devait me convaincre et honnêtement, je ne partais pas perdant. Disiz est un des rares rappeurs de France qui ne m'a jamais déçu. Mon manque d'affection pour Extra-Lucide vient de la longueur de l'album et de son manque d'originalité, doublé à un côté répétitif, mais en soi, je ne le trouvais pas si mauvais. Pour Transe-Lucide, on est forcé de reconnaître que Disiz, à défaut d'évoluer, régresse. Faisons la chronique de cet échec inopiné.

Déjà, l'album est composé de 3 parties différentes : Terre, Eau et Ciel. Et j'ai envie de dire "certes, et alors ?". Enfaite cette division n'apporte rien, que ça soit dans les thématiques ou dans les sons. L'album prétend traiter des problèmes de l'enfance en premier, puis l'adolescence et la maturité. Pourtant, si les textes de fin semblent effectivement mature, les deux premiers apparaissent comme interchangeables. Là, il s'agit d'une grosse déception pour moi. Faire un "concept" sans rien derrière n'a à mon sens aucun intérêt sauf celui de se prétendre plus que l'on est.
Or, Disiz, dans cet album, prétend bien plus qu'il n'agit. Celui qui annonce avoir un "nouveau flow" aurait mieux fait d'assumer ce qu'il dit également lorsqu'il annonce être "Disiz la Peste". Oui, Disiz = Disiz la Peste. Pas d'évolution, mais des changements, dans le mauvais sens ! Le flow loin d'avoir évolué a même régressé, se laissant aller à des facilités (ex: "spo-por-por-port" et autre "ho ho ho" ou "hahahaaaaaa"), Disiz semble oublier l'importance d'avoir une technique travaillé.
Les paroles oscillent entre le "What ?!" et le "Mais encore ?". Globalement Disiz fait beaucoup de masturbation stupide ne cessant de dire "j'ai inspiré les autres, moi je suis un vrai, je donne la bonne parole" ... Mais alors, dit la ! Disiz ne cesse de se vendre sans rien offrir de réellement constructif. Certes, les fans (dont je fais partis) peuvent bien voir les références aux passés, mais en quoi ce disque, lui, apporte-t-il quelque chose de vraie ? Rap Genius est bien représentatif de la déception qu'est cet album, faussement bon, en analysant un peu les paroles on ne peut y voir qu'un autre égo-trip sans réel profondeur ni effort.

La liste des déceptions est très très grande dans cet album. Miskine, par exemple, fait la liste des envies d'enfants (ou d'ado) de Disiz, le tout d'une voix monocorde avec au milieu des refrains rappelant qu'il "y a des jours avec, y a des jours sans". Certes, ok, c'est un peu spécial comme forme mais j'accepte. Ou plutôt j'accepterais si il y avait un fond, une profondeur. C'est très dur de voir Disiz, ce parolier de génie nous offrir des morceaux aussi bas de gamme, faussement émotif et à peine travaillé.
Dans un genre différent Fuck les Problèmes fait partie de ces morceaux faussement émotifs sur l'auto-destruction mais qui sonne particulièrement faux. D'une part, par la voix trafiquée à fond, deuxièmement par le manque de profondeur du texte, celui-ci est totalement superficiel et est loin de montrer le talent d'écriture de Disiz. Enfin, quand on voit ce que le type a pu écrire sur des sujets similaires par le passé, on se dit qu'on est vraiment loin du génie là.
Globalement on a beaucoup de fois les thématiques de Disiz, du genre "aime ton prochain", "soit honnête avec toi-même", etc ... Je vais maintenant aller voir Dora l'exploratrice pour être dans la droite logique. Car ce que l'on aime avec Disiz, c'est sa capacité à être honnête, à ne pas faire les choses à moitié, et ça, ça manque beaucoup dans cet album. Heureusement ce n'est pas le cas de tous les morceaux. Kamikaze (piste 4) rappelle donc que même les patrons ont des patrons et qu'ainsi de suite, tout le monde est plus ou moins coupable. Cependant, le titre essaie de retrouver le côté fou-fou du début mais perd en cohérence et devient un peu lourd.
D'ailleurs l'instrumental est souvent loupé je trouve, ou plutôt, souvent moyen. Certes, les sons sont plus étranges et peuvent coller au titre de l'album, mais parfois, faire simple et efficace suffisent.

Certes, beaucoup de titres sont des fausses réussites (Burn Out au hasard, qui enfaite donne juste envie de couper le son), mais il y a quand même quelques pistes réussies. Certes, pas assez pour sauver l'album, mais au moins, on évite de perdre le total. Je vous rassure, c'est pas King of Cool qui fait parti des textes bien "incompris, mais juste des loosers".
Non, le morceau qui ouvre (vraiment) l'album, Banlieusard Syndrome est pas mal du tout. Je trouve le texte assez sympas, même si le son est très sombre, il a le mérite de coller aux paroles. Disiz la Peste a la sincérité de nous offrir le monde réel sans vouloir mieux le vendre. C'est justement ça qui nous fait regretter de ne pas avoir tout un album comme ça.
Surtout qu'on doit se taper tout l'album avant de retomber sur un truc vraiment sympa. Bon, certes y a Kamikaze entre temps mais finalement avant Luv [Prend le risque], on est assez pauvre en morceau de qualité. cependant, il s'agit, pour moi, de la grosse surprise de l'album. Très bon morceau, très agréable, qui pourtant respire la naïveté qui était dans Extra-Lucide. Mais là où ça remplissait le disque précédent, c'est ici une petite dose, touchante, sincère, bien faite. Très bon morceau. On espère presque que l'album se finira sur cette bonne touche. Pourtant après y a Complexité Française, là encore sujet bien traité. La complexité du métissage est bien amené, même si on peut se sentir très loin de tout le côté "égo-trip" de certains passages de cet album. On est également assez loin de ce que Disiz pouvait évoquer rapidement sur le même sujet dans ces premiers album. Pour autant, c'est franchement sympa, donc, on se laisse kiffer. Seul regret ? Le refrain en anglais. Je sais que Disiz adore cette langue (et moi aussi), mais un morceau sur le fait (notamment, y a pas que ça non plus) d'être français sans avoir à être intégré et donc à renier également ses origines africaines aurait gagné à ne pas avoir de refrain en anglais. Même aussi bien fait.

Bref, si Transe-Lucide n'est pas le pire album rap du monde, loin de là, il vient d'un grand qui n'a quasiment offert que des pures galettes. La déception est donc justifiée quand on voit d'où Disiz part. De plus, si on a l'impression qu'il revient finalement comme avant Disiz the End, on peut craindre qu'il garde une orientation aussi moyenne que celle de cet album. Les quelques bons morceaux de l'album ne permettent pas d'oublier cette déception mais font au moins passer un bon moment.
Maintenant croisons les doigts pour que Disiz se reprenne en main.
mavhoc
3
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le 13 avr. 2014

Critique lue 552 fois

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mavhoc

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