Ecrit sur la route, ce deuxième album de Blüe Öyster Cult est un condensé de groove, de mélodies et d’inventivité. On comprend que les musiciens se sont servis de l’énergie transmise par les fans pour insuffler à leurs chansons un allant communicatif qui emporte l’auditeur dès les premières mesures de « The Red & The Black ». Tyranny and Mutation place immédiatement le groupe dans le peloton de tête des meilleures formations de l’époque. Moins torturé que leur premier opus, celui-ci puise son inspiration dans le blues et propose de jolies parties de guitares, à la fois fluides et inspirées, sans jamais oublier de nous surprendre par des arrangements inédits à l’époque.
Pour revenir sur « The Red & the Black », ce morceau, qui est immédiatement devenu un incontournable en concert, s’appuie sur un riff sautillant et jouissif. A la manière d’un Budgie et de son « Bredfan », paru la même année, les Américains jouent la carte de la positivité et ça fonctionne parfaitement. Tout aussi enjôleur, « O.D.'d on Life Itself » s’appuie sur un riff blues-rock et des claviers discrets qui nous donnent envie de taper du pied. Les soli sont particulièrement réussis et transpercent tout cela avec une fluidité réjouissante. Blüe Öyster Cult plongent dans ses racines américaines, mais avec une énergie à la MC5 et des chœurs que ne renierait pas Aerosmith à ses débuts. Tout aussi étonnant, le rapide « Hot Rails to Hell » sonne plus anglais, avec son chant proche des Who. Là encore, les guitares sont à la fête pour notre plus grand plaisir. La face A se clôt sur le vrombissant « 7 Screaming Diz-Busters », présent sur leur premier live dans une version un peu différente. Assez complexe, il se construit autour de la basse et de riffs rapides, pour mieux laisser la place à des changements de rythmes incessants. Evoquant à certains moments « Baby Please Don’t Go », à d’autres du jazz fusion, ce titre, finalement assez mal reconnu, est un petit bijou de construction et d’exécution.
Plus progressive, la face B débute par « Baby Ice Dog », un morceau plein de nuances et profondément progressif, avec son piano, ses riffs légers et ses changements d’ambiances. A mi-chemin entre le rock, le jazz-fusion et le progressif, ce titre est clairement destiné au studio, même s’il trouve un peu d’énergie dans son dernier tiers. Presque planant, « Wings Wetted Down » s’inscrit dans la lignée des Who, avec ses mélodies vocales proches de celles des Anglais et son piano que vient perturber une guitare saturée assez étonnante, aux sonorités proches de Black Sabbath. Un solo met tout le monde d’accord. Rapide et rythmée, « Teen Archer » est un rock hard au riff étonnant, qui fait la part belle à la section rythmique. Flirtant avec le progressif, c’est pourtant la chanson la plus rock de cette seconde face, notamment grâce à ses soli de claviers. La nuancée « Mistress of the Salmon Salt (Quicklime Girl) » termine cet album dans un mélange de rock progressif et de rock théâtral, comme si le Genesis des débuts avait croisé la route d’Alice Cooper et des Who.
Pour ce deuxième album studio, les Américains accouchent d’une œuvre quasiment parfaite, qui ouvre de multiples chemins susceptibles de ravir les fans les plus exigeants.