Joshua Lee Turner et Carson McKee, les deux membres des Other Favorites, ont commencé à proposer des reprises de qualité sur Youtube il y a une quinzaine d'années, alors qu’ils étaient adolescents.
Au fil des rencontres, ils ont créé quantité de collaborations de qualité autour d’un noyau de musiciens talentueux (Reina del Cid, Tony Lindgren, Jim Hogan, Alisson Young, etc) dans des styles assez variés, allant du Bluegrass au jazz vocal.
Les techniques de jeu et d’écriture se sont petit à petit peaufinées.
Unamericana est leur deuxième album et vient en quelque sorte consacrer toutes ces années de travail, tout en douceur. On trouvait déjà d’excellents morceaux sur leur premier EP (Fools) comme Angelina (et son solo hypnotique) ou Flower in the city (une voix, deux guitares, je conseille). Ici l’équilibre d’ensemble est encore plus abouti.
C’est du folk pur jus, à l’ancienne, ancré dans la culture américaine, avec quelques ouvertures sur le monde actuel qui se dépose comme la rosée sur de vieilles branches. Pour ceux qui apprécient les guitares sèches, les arrangements clairs, simples et efficaces, la justesse du jeu, la précision des notes choisies, c’est un plaisir.
La voix de Carson possède une chaleur et une précision assez remarquable par rapport à celle de ses débuts. Sur Cherry Wine, accompagnée des parties solo jazzy de Josh (musicien hors pair au demeurant), elle suffit presque à créer une ambiance à elle seule.
Quand Josh reprend le flambeau, notamment sur Blade Away, avec une voix plus haute, le contraste est très appréciable. Les deux se complètent très bien.
L’essentiel des influences vient des années 60. McCartney (que l’on retrouve dans la dernière chanson, un peu naïve), Paul Simon, Nick Drake pour Josh Turner, Bob Dylan pour certains textes de Carson McKee.
L’écriture, parfois intimiste, comme dans Blade Away, nous entraîne dans d’agréables histoires au long cours (Colorado Soldier, Roses and Gloom, Cherry Wine)
Les paroles de Harbinger commence ainsi de manière très saisissante (je traduis) :
« Tu cavales dans une impasse, à la poursuite de ton ennemi. Lorsqu’il est au sol, sous la menace de ton dernier coup, il s’écrie : tu ne me reconnais donc pas ? Je suis ton frère. »
Et Roses and Gloom dessine en deux couplets bien contrastés l’échec d’une vie morose.
Jusque-là, le groupe s’appuyait sur d’excellentes connaissances techniques pour enregistrer ses morceaux (on peut trouver quelques rapides tutoriels sur leurs chaînes respectives). Cet album, produit avec l’aide de Phil Weinrobe dans un studio de Brooklyn, leur permet de sonner de manière encore plus professionnelle, sans trahir leur style, tout en simplicité.
Mon goût pour cet album vient sûrement, en partie, du fait de les avoir suivi tout ce temps et d’avoir pu apprécier leur incroyable progression, ainsi que la quantité de travail énorme qui se trouve derrière leurs chansons. Et je ne cache pas le plaisir qui vient de cette proximité toute virtuelle.
Aucune révolution musicale. On est sur du classique, mais parfaitement incarné (avec une excellente reprise de I’m on Fire de Springsteen en fin d’album)
« Soldat du Colorado, descends ta garde. Il n’y a rien d’autre à tirer ici que les daims et l’air de la brise ». (Colorado Soldier)
Bonne écoute.