N'ayant pas fait de tournée suite à l'album Experimental Jet set, Trash And No Star sorti en 1994, Sonic Youth publie, dans l'année suivante, Washing Machine qui, dès "Becuz", fait sentir que le ton a changé avec une atmosphère plutôt lourde et des guitares désaccordées qui hululent de la tristesse.
Mais je l'aime cet album ! Ce n'est pas objectif et je n'en ai cure. Il est d'une tonalité particulièrement crépusculaire et nous fait descendre lentement un long fleuve d'où l'on contemple des rivages mélancoliques et emplis d'éclats noise, parce que c'est Sonic Youth quand même. Kim Gordon chante avec toujours sa voix étranglée, parle parfois comme on peut l'entendre, rejointe par Kim Deal (Pixies, The Breeders), dans "Little Trouble Girl", la petit douceur de la fin de la face A (cassette).
J'aime cet album aussi parce que le batteur, Steve Shelley, apporte du plaisir à écouter certains des titres quand ce dernier immisce parfois, dans des rythmiques, des petits roulements en glissant des sons de charleston et de cymbales comme des tapis métalliques presque subtiles. Ça n'a rien d'extraordinaire me diriez vous peut-être, mais franchement ça entraîne, ça donne envie d'y revenir. Et ce n'est guère étonnant après cette constatation de passer en boucle les titres comme "Becuz", "Washing Machine" mais également le saccadé "Panty Lies" rythmé aussi par la basse de Kim Gordon tel un pouls insidieux. Et puis, autre plaisir, il y a aussi "No Queen Blues", morceau plus hargneux, où les guitares de Thurston Moore et de Lee Ranaldo hurlent.
Comme tout long et lent fleuve, il y a au bout une embouchure. Alors nous arrivons pour les vingt minutes ou presque du splendide morceau final, "The Diamond Sea", longue ballade qui finit vers une mer de réverbérations et de larsens au bout d'un voyage sonore à travers des chansons aux mélodies dissonantes et lugubres.
Un grand album de Sonic Youth ? Je continue de le penser !