Retour sur le passé du groupe
S’il y a bien une chose qui a toujours occupé l’esprit de 65daysofstatic, c’est une recherche sonore toujours plus poussée, durant sa carrière, le groupe s’est cherché, en variant sans cesse de style.
Ne nous avançons cependant pas trop, 65dos reste avant tout un groupe de Post Rock, avec guitares, batterie, basse et piano.
Mais un qui sait jouer avec le genre, le pousser dans divers retranchements : on y associe des éléments Glitch/samples ultra-nombreux à la Aphex Twin dans l’EP "Stumble. Stop. Repeat." (Thrash Waltz), des passages Math Rock, noisy et quelques hurlements stridents dans "The Fall Of Math" (Another Code Against The Gone); dans "One Time For All Time", on retrouve un Post Rock plus classique placé sur une base de riffs punks sauvages, et le morceau ultra-culte du groupe, Radio Protector et sa boucle de piano délivrant une montée en puissance spectaculaire; le décevant "The Destruction Of Small Ideas" parvenait malgré tout à s’offrir la grâce d’un morceau à la limite du screamo, The Conspiracy of Seeds qui se paye le luxe d'être chanté par Circle Takes The Square.
Puis était venue une rupture avec "We Were Exploding Anyways", le précédent album n’avait pas été pensé pour le live, aux dires du groupe, 65dos tranche alors avec ses débuts pour un tournant beaucoup plus électronique qu’à l’accoutumée, parfois dansant, parfois plus pop (présence de Robert Smith sur Come To Me), souvent lorgnant vers The Prodigy, en conservant la véhémence des premiers albums (le monstrueux final de Crash Tactics, Weak4), tout est pensé pour le live. Les fans se divisent, certains crachent sur ce virage assez brusque, d’autres applaudissent une volonté de changement.
En dépit de ces variations, et de nombreux changements de membres, une unité certaine parcoure cette discographie, et la recette des morceaux les plus aimés du groupe reste souvent à base de morceaux courts, directs et violents, de motifs de piano et de riffs soudains gras et saturés.
Comme dit précédemment, c’est donc dans ce cadre de recherche DU son qui leur conviendrait parfaitement que naîtra "Wild Light", éternels insatisfaits, le quatuor de Sheffield fait comme à son habitude Tabula Rasa sur leur dernier acte, et abouti cette fois à une alchimie proche de la perfection.
Premiers pas
Une chose frappe tout d’abord à l’écoute de "Wild Light", la production est admirable, sans être lisse. On perd sans doute le côté brut de décoffrage et crade que pouvait avoir leurs premiers efforts, mais on gagne une profondeur de son incroyable, une netteté lors des transitions, désormais les différentes couches sonores viennent s’intercaler impeccablement.
On reconnait dès lors nombre d’influences du groupe, on retrouvera pêle-mêle Mogwai, Fuck Buttons ou encore M83 au court de ce voyage à travers la saturation.
Car oui, l’album est saturé, plein à craquer, par moment oppressant, sombre, voire tordu, parfois méchamment somptueux, rares sont les moments de répit offerts à l’auditeur, prévenu dès la piste introductive, Heat Death Infinity Splitter :
No one know what is happening.
There is a lot of danger out there, okay ?
Baffes et grâces
Après s’être pris cette première torgnole, il est déjà trop tard, les salves s’enchaînent. Prisms présente une explosion jouissive et inattendue en alternant pourtant juste deux motifs électro-dantesques, reprend ses esprits sur quelques notes d’un piano beau à pleurer ; piano sensible et sensé qui restera tout le long du disque l’abri, les bras ouverts et consolateurs face à la tempête sonore extérieure.
Et les morceaux suivants sont tous du même acabit, parfois inquiétants (The Undertow, Sleepwalk City), toujours splendides et réfléchis, ne laissant rien au hasard, et privilégiant la longueur à la concision des premiers albums.
Mais c’est finalement dans les dernières pistes qu’on trouve l’apogée de "Wild Light", et qu’on retrouve cette lumière sauvage qu’on peinait à trouver jusqu’ici ; le dépaysant Taipei, judicieusement choisi comme single, rappelle le Mogwai de "Young Team" (Tracy) par son romantisme jusque-là inconnu chez 65dos ; l’incroyable et lyrique Unmake The Wild Light est tout simplement le morceau Post Rock parfait, tant l’utilisation des pédales à effet et la progression se veut judicieusement dosée, jusqu’au mur de son final.
Puis l’accalmie, Safe Passage s’ouvre le plus calmement possible, toujours sur ce piano rassurant, avant un dernier rappel de la saturation, du bruit sourd de la batterie sur fond de riffs héroïques.
Ca y est, je l’ai fait. J’ai survécu à "Wild Light". Je suis redescendu sur Terre, le cocon sonore dans lequel j’étais emmitouflé s’est brisé.
Jusqu’à une nouvelle écoute.
Ou un live, si je suis chanceux et qu'ils passent prêt de chez moi.