Monsieur je pète plus haut que mon cul
Enfin le retour du fils prodige, voilà une phrase que notre Kanye West doit se répéter dans son miroir tous les matins. Né avec un égo surdimensionné et le sentiment profond d’être Neo dans la matrix, West se surpasse encore une fois dans l'art de parler de lui à la 3ème personne (cf. ses interviews) passant ainsi pour le gourou de la perfection. Il est de mise de parler plus souvent du caractère excentrique du bonhomme que de sa musique. Après 3 trois ans d’attente (je ne compte pas Watch the Throne, très bon, et Cruel Summer, moins bon) il revient avec « Yeezus » (déjà rien que le nom annonce la couleur, un Kanye encore plus « névrosé »).
Encore plus surmédiatisé que le nouveau Daft Punk (surtout d’un point de vue mondial) avec des projections de ces clips dans les plus grandes villes de notre planète, Kanye West se met la pression lui même. Cependant Monsieur n’aime pas la radio, « ce n’est plus là où je veux être » donc il annonce qu’aucun single sortira… j’imagine bien la réaction de la maison de disque ! Côté production on retrouvera par moment les deux acolytes français, No I.D., RZA et Rick Rubin entre autres.
Continuant le chemin entrepris il y a plusieurs années K. West oublie peu à peu les racines du hip-hop (la soul principalement) pour se concentrer sur les tendances du moment : une électro sombre à la limite du cruel. Gonflé à bloc West rage les ¾ du disque sur ces opposants. Tous ça mis en scène sur de grosses (DE GROSSES) basses (cf. I am a god). Le disque est très uniforme et aucun morceau ne se détache plus des autres. On note quand même une 1er partie « nouveau Kanye West » et une seconde plus habituelle (cf. Guilt Trip avec Kid Cudi) dans laquelle West oublie un peu les filtres et l’autotune (et c’est pas une mauvaise chose tant le début du CD est saturé par le mixage final et ses ajouts d’effets).
Habitué des gros featurings à l’américaine tu vas être déçu : seul Kid Cudi et aller… Frank Ocean répondent présents. Mais côté production on retrouve les Daft sur notamment et principalement le premier morceau, On Sight, et c’est… pas forcément réussi (le passage avec les enfants est horrible…). La suite est un enchainement de morceau « à fortes basses » où développe son flow autotuné sans âme mais avec passion. Justin Vernon amène cependant quelques lumières dans ce monde bien sombre (notamment sur I’m In It).
Mais, MAIS, le génie de West resurgi par moment ! « Blood on the Leaves » avec Tony Williams est vraiment réussi. Le théâtrale (et mis en avant par West) « New Slaves » est maitrisé malgré l’ajout abondant de basses. Ou encore « Hold My Liquor » qui me rappelle 808’s and Heartbreak avec son « couinement » de fond.
Ces quelques éclairs ne suffissent pas à qualifier le disque de « classique ». Sans pour autant être foncièrement nul, Yeezus n’est qu’une étape de plus dans la mystification du sacro saint Kanye West. D’un point de vue très personnelle, l’utilisation abondante de basses cache (et gâche) l’incroyable flow qu’il possède. Le bon goût de West (découvert avec les samples développés sur ces deux premiers opus) est ici quasiment absent, signalons quand même « Strange Fruit » interprété par Nina Simone.
Ou sont passés les « Jesus Walks » du début, les « Gold Digger » de la confirmation et les « Stronger », « Love Lockdown » du succés ? Je ne pense pas retenir très longtemps un seul de ces morceaux (bien que Blood on the Leaves est vraiment bien). Un peu à l’image de Year of the Dragon de Busta Rhymes, c’est un album qu’on oubliera assez vite.
Pour conclure, on assiste à un Kanye West qui se perd dans sa suffisance en oubliant que la musique est avant tout un élément de partage. Et c'est un GRAND FAN de The College Dropout et Late Registration qui dit ça.
« Musique pour les élites ».