Pas grand chose à sauver en dehors de Romtia Jr

Cette intégrale 1985 tome 1 se caractérise par une qualité très moyenne et une certaine inconsistance narrative, avec des arcs sans véritables liens entre eux, et même des trous à cause d'épisodes indisponibles. Du coup, l'ensemble manque de liant, avec ce désagréable sentiment de ne pas avoir entre les mains le contenu nécessaire pour connaître l'intégralité des aventures de nos héros sur cette période, ce qui est problématique pour une intégrale.

Je ne blâme pas Panini car je pense qu'ils font au mieux avec le matériel disponible, et cela ne serait pas tellement problématique si le contenu de l'album était de qualité mais ce n'est, à de rares exceptions près, pas le cas ici.

Nous retrouvons dans les trois premiers épisodes la sorcière Séléné apparue l'année précédente, qui en a toujours après Rachel, entraînée ainsi que tous nos héros dans un New York ensorcelé par Kulan Gath, qui voudra dominer le monde. On y retrouvera un certain nombre de héros Marvel pour un récit fantastique vraiment sous-développé, trahissant un peu le penchant de Claremont de surcharger parfois ses histoires (coucou la saga des Broods) sur peu d'épisodes, aux dépends d'un Romita Jr sans doute débordé et peu passionné par le sujet tant ils sont assez faibles graphiquement. Personnellement les récits à base de magie ne me passionnent pas (il y a de rares exceptions, comme le formidable crossover Inferno), et ce fut ici une lecture particulièrement pénible.

On enchaîne avec un épisode où les X-Men affrontent Magus, le père de Warlock. On apprend ici que Diablo a été désigné leader de l'équipe, et il se montre un peu mal à l'aise dans ce rôle bien qu'il essaie de faire de son mieux. J'y vois là une occasion manquée de donner sa chance à Wolverine, le plus expérimenté de l'équipe, mais encore considéré comme impulsif et pas assez fiable. Dommage après 10 ans de présence dans l'équipe de ne pas mettre en avant ce personnage qui a l'étoffe d'un leader. Mais il était absent car parti au Japon avec Kitty pour une histoire absente de l'album. Puis Xavier, devenu professeur à l'Université, sera grièvement blessé dans une agression anti-mutant, ce qui affectera ses pouvoirs télépathiques. Hormis ces quelques informations intéressantes, l'opposition sans conséquences contre Magus paraît totalement dispensable, mais heureusement rendu digeste par le talent revenu de Romita Jr.

Pour l'épisode suivant qui est le numéro 100 (#193 en réalité, mais j'en déduis que c'est le 100e depuis le relaunch de 1975) nous avons droit à un épisode double avec enfin une équipe au grand complet: Diablo, Wolverine, Colossus, Malicia, Kitty et Rachel, intégrée de fait dans le groupe; Tornade quant à elle est partie se ressourcer en Afrique, cherchant sa place dans le monde maintenant qu'elle n'a plus de pouvoirs (voir intégrale 1984).

Alors que Xavier a été récupéré et soigné par les Morlocks (l'occasion pour lui de constater le mode de vie de ces mutants vivant cachés), régulièrement présents ces dernières années dans la série.

La trame principale de l'épisode est consacrée au désir de vengeance de James Proudstar, membre des Hellions de la Reine Blanche et petit frère d'Epervier, désirant faire payer aux X-Men et à Xavier en particulier la mort de ce dernier. Celui qui se présente comme un ennemi, aidé par d'autres membre des Hellions (dont Firestar, future membre des New Warriors) finira par remettre en question le bien fondé de sa colère dans un face à face psychologique avec le Professeur X. On constate aussi la fragilité de Rachel qui souffre des traumatismes de son passé, ce qui va la paralyser au cœur même des combats. Un syndrome du boulet qui aura malheureusement tendance à être sa marque fabrique. Cela engendre néanmoins une certaine attente vis-à-vis d'un personnage à la puissance potentiellement énorme.

L' épisode suivant verra le retour de Nemrod, robot énigmatique venu également du futur qui a pour mission de protéger les humains, et s'en prend donc aux mutants à la moindre occasion. Présent en filigrane depuis l'année 1984, il jouit d'une bonne réputation auprès des habitants qui le considèrent comme un héros qui les protège. La simple présence du Fléau en ville déclenchera Nemrod en mode combat, et il n'aura aucun mal à se payer ce vilain pourtant surpuissant, ainsi que les X-Men qui surveillaient leur vieil ennemi. Il faudra que Malicia absorbe les pouvoirs de Colossus et Diablo pour arriver à le repousser, mais il disparaîtra de son plein gré. Un épisode assez simple et bourré d'action mais satisfaisant, justement parce qu'il va à l'essentiel.

Mais alors qu'un regain d'intérêt commençait à renaître (nous sommes à la moitié de l'album), s'ensuit un épisode avec les enfants surnommés Puissance 4 pour un passage encore une fois anecdotique. On notera à nouveau la présence des Morlocks dans ce chapitre, mais rien de notable à retenir.

Dans l'épisode suivant, Xavier charge les X-Men de retrouver des étudiants qui fomentent un meurtre. Charles l'a senti lors d'un cours qu'il donnait mais ses capacités amoindries l'empêchent d'investiguer lui-même plus avant. Sans surprise, ces étudiants se révèlent être ceux qui l'on agressé, et Rachel sera sur le point de tuer le responsable, mais sera ramenée à la raison par Magnéto. Sans savoir quand ni comment (encore un manque d'explication assez frustrant), Charles s'est rapproché d'Erik et ce dernier semble désormais avoir fait amende honorable, restant alors dans le giron des X-Men. Un changement intéressant qu'il aurait était judicieux d'approfondir. En arrière plan, une sous-intrigue, comme aime tant le faire Claremont, est distillée avec la présence du Beyonder (le responsable des Guerres Secrètes) qui observe les X-Men, en particulier Rachel, afin de comprendre la nature humaine.

Après cet épisode relativement bon (par rapport à l'ensemble de l'album, autrement il pourrait être considéré comme correct s'il était entouré d'épisodes vraiment solides), encore un plutôt dispensable où Colossus et Kitty seront les jouets d'Arcade pour une histoire de faux semblant sans intérêt, à peine de quoi faire avancer leur relation vers une belle amitié.

Donc jusqu'à maintenant nous avons eu 3 épisodes corrects sur les 9 de la série Uncanny X-Men. Une des rares satisfactions est de voir le rôle prépondérant que prend Kitty au sein de l'équipe, même s'il n'y a pas d'épisode totalement centré sur elle, Claremont lui donne de plus en plus de place et développe une personnalité sensible, mature, altruiste et courageuse, une vraie plus value pour l'équipe. Elle n'est plus la jeune et fragile novice, mais une X-Woman à part entière.

Il reste un dernier épisode d'Uncanny X-Men consacré à Ororo, dessiné par un Windsor-Smith très inspiré, illustrant avec brio ce récit touchant qui trace le cheminement qu'elle accomplit pour trouver son nouveau rôle dans ce monde.

Et pour finir, un annual au ton plutôt léger qui opposera les X-Men et quelques guests à l'homme Impossible, illustré par 2 inconnus, Michael Golden et Bret Blevins, qui ne s'en sortent pas si mal. Pas mauvais mais pas de quoi relever particulièrement le niveau global de l'album.

Le bilan est donc décevant: 4 épisodes plutôt bons sur les 11, cela fait peu. Si l'on ajoute ces épisodes manquant qui nuisent à la vision d'ensemble, un enchaînement d'arcs narratifs sans lien véritable et le fait que globalement les scénarios ne développent rien d'extraordinaire, on ne pourra se satisfaire que du travail de Romita Jr (hormis les 3 premiers épisodes) et Barry Windsor-Smith. Les quelques réponses aux interrogations laissées par l'intégrale précédente (le retour de Séléné et le leadership de l'équipe, notamment) auront de quoi laisser sur notre faim.

Je ne retiendrais donc que quelques éléments, tels que la place de Kitty, le retour en grâce de Magnéto, ainsi que la présence des Morlocks, de Nemrod et du Beyonder en trame de fond, en espérant que Claremont se décide à aller plus loin en terme de dramaturgie et d'envergure, au risque de s'ennuyer ferme.