Ne cliquez pas sur cet avis, on s'en moque, allez plutôt lire le manga en question.
2001 Nights Stories est divisé en 3 volumes pour un total de 20 chapitres -intitulés des "nuits"- qui peuvent s’étaler sur 20 comme 100 pages, la majorité du temps, une quarantaine. Je sais, ce n'est pas la manière la plus séduisante de débuter une critique, mais c'est un moyen comme un autre d'introduire la façon dont s'articule le récit.
Le thème est ici la conquête spatiale, de la sortie de notre système solaire à l’exploration en passant par la colonisation. Des thèmes usés, mais traités ici de manière bien singulière. L'histoire s'étend sur plusieurs siècles, pas d’individu central, pas de suite directe d’un chapitre à l’autre malgré des évènements qui auront une influence sur d’autres chapitres, mais avec discontinuité donc. Chaque nuit se présente comme un « conte », comme la mise en images d’une nouvelle, sans impliquer les mêmes personnages ou lieux que le précédent. L’unité de la chose se trouve alors dans la chronologie et la thématique générale. Concrètement on trouve une continuité temporelle via l’évolution technologique de l’homme. Et évidemment tous ces chapitres abordent la thématique générale de la conquête spatiale par l’humanité.
Cette construction permet à Yukinobu Hoshino d’introduire divers sujets en fonction de la nuit que l’on parcourt : l’homme et son rapport à la spiritualité, sa volonté de domination de la nature, sa fascination pour une éventuelle vie extraterrestre, etc. Si le titre 2001 Night Stories vous fait forcément penser à l’œuvre de Kubrick, pas d’inquiétude, l’hommage est plus qu’assumé par l’auteur. Dès les premières pages, il ne laisse aucun doute planer : « progéniture », la première nuit, est ainsi une mise en images fixes de l’introduction de 2001 l’odyssée de l’espace. Et par la suite d’autres références plus ou moins discrètes se glisseront, çà et là, dans le récit, comme un clin d’œil à Hal (ça ne va pas au-delà, ce n’est pas un décalque du récit de l’œuvre de Kubrick ou de Clark). Enfin l’esthétique réaliste et froide de 2001 Nights Stories pourra clairement évoquer celle du film et plus globalement la science-fiction antérieure à sa création. On est bien loin de l’esthétique sombre et décadente des nouveaux porte-étendards 80’s que peuvent être Akira ou Blade Runner. Les vaisseaux sont ici immenses et majestueux, l’architecture intérieure est clean, le style vestimentaire kitsch.
Finalement 2001 Nights Stories c’est beaucoup de choses. 750 pages qui mettent magistralement en images l’immensité, la découverte et le vide. Une œuvre qui transpire la passion comme en témoigne l’évident travail de recherche effectué par Yukinobu Hoshino en matière d’imagerie et de science spatiale (on va ne pas non plus tomber dans l’auto-fellation, ça parle aussi d’hyperespace hein, forcement). Des courtes histoires qui ne cherchent pas à nous lier à des personnages mais qui pourtant véhiculent des émotions. Un tout cohérent qui évoque à travers les efforts d’individus isolés l’infini besoin de connaissances comme de ressources de l’homme, et qui dépeint admirablement ses forces comme ses faiblesses.
Ce n’est pas une révolution dans le monde de la science-fiction, mais c’est diablement solide.
Dernier petit détail, il me semble que la seule édition actuellement accessible en France, est celle de Glenat. A savoir une édition limitée à 100€, comme si elle était destinée à une "élite" inexistante puisque l’œuvre ne m'a pas l'air particulièrement connue chez nous...Judicieux.