Ythaq est une planète particulière. Elle n’apparaît sur une autre carte spatiale. Pourtant cela fait des siècles que des vaisseaux s’y écrasent. « Les naufragés d’Ythaq » nous conte le devenir de certaines de ces victimes de crash mystérieux. Durant le premier cycle composé de neuf tomes, le scénariste de Christophe Arleston et le dessinateur Nicolas Floch nous font suivre le quotidien de Granite, Narvath et leurs amis. Au cours de leurs pérégrinations, ils ont été amené à découvrir les causes de leur présence sur cette planète et trouveront même le moyen de la quitter pour retrouver leur quotidien et leur réalité. Cette intrigue mêlant science-fiction et fantasy était de qualité inégale. Le début était de bien meilleure qualité que le dénouement qui frôlait la catastrophe. Néanmoins, l’empathie pour les personnages principaux m’avait permis de passer outre les faiblesses trop fréquentes du scénario.
J’avais été surpris de voir naître une suite à ce neuvième épisode. Malgré la déception de ce dernier opus, je m’étais malgré tout décidé à découvrir les nouvelles aventures de Granite et ses amis. Les débuts ont été loin de se révéler enthousiasmant. Je trouvais dommage que la science-fiction prenne largement le dessus sur la fantasy. De plus, les auteurs essayaient de donner, sans réel succès, une dimension politique à la trame. Cet aspect s’avérait brouillon et confus. J’étais même frustré de me perdre dans les arcanes des hautes sphères au détriment du temps passé aux côtés des héros historiques de la saga. Heureusement, en lisant le treizième tome, ma patience semblait devoir être récompensée. Les personnages principaux s’échouaient à nouveau sur une planète sauvage et inconnue. L’atmosphère divertissante des débuts semblait renaître. Cela me rendait optimiste à l’heure de me plonger dans le dernier tome paru, le quatorzième, intitulé « Le Joyau du génie ».
Granite, Narvarth et Danaëlle cherchent à se faire leur place sur la planète Glèbe. Alors qu’ils sont recherchés par les Purpres, ils ont trouvé refuge auprès des makis, guerriers autochtones au ton bourru et belliqueux. Mais ces derniers n’ont pas prévu d’entretenir gracieusement avec le sourire leurs trois hôtes. En effet, les trois fugitifs se voient missionner pour réparer d’un vieux glisseur s’ils souhaitent être épargnés par leurs « protecteurs ». Parallèlement, les réfugiés cherchent à en savoir davantage sur cette planète. Mais il n’est pas évident de mener une enquête quand toute rencontre semble être hostile ou dangereuse…
Comme je l’évoquais précédemment, j’ai apprécié le retour des codes de la fantasy : territoires inconnus, faune et flore originales, habitants divers et variés. Je trouve que les auteurs sont plus à l’aise dans cet univers-là que dans une trame davantage axée « science-fiction ». Le pan de fantasy est divertissant alors que le pan de SF est davantage une course à l’excès un peu maladroite. Donc cet album s’avère plutôt réussi sur le plan récréatif. Le trio principal fonctionne bien. Ils sont drôles et attachants. Les interactions avec les différents peuples qui occupent Glèbe sont bien construites et donnent lieu à des situations et des dialogues souvent cocasses. Par contre, je ne peux pas dire que les événements qui se déroulent sur cette mystérieuse planète soient particulièrement trépidants. La trame est assez diluée et les rebondissements ne sont pas très fréquents. Au final, en refermant le bouquin, je ne peux pas dire que l’intrigue sur Glèbe ait beaucoup avancée ou que les héros y voient beaucoup plus clairs.
Malgré le retour à la fantasy, la saga n’a pas mis de côté ces grands combats politiques et intergalactiques. Nous avions laissé tout ce petit monde en plein coup d’état à très grande ampleur ! Nous assistons ici à une course-poursuite spatiale entre les dirigeants renversés et une armée dirigée par un monstre très méchant. Là encore, on ne peut pas dire que cette partie de l’intrigue soit passionnante. Il s’agit davantage de petites pastilles narratives qui coupent les aventures de Granite et dont le seul objectif est de faire en sorte que les politiciens se trouvent sur Glèbe. Bref, j’ai apprécié que cet aspect soit secondaire dans cet album mais j’ai regretté qu’il soit traité de manière trop superficielle pour enrichir l’histoire.
Les dessins sont l’œuvre d’Adrien Floch. Illustrateur historique de la série dont il est un des atouts indéniables. Il possède une qualité certaine pour donner vie à ce monde mystérieux, à sa flore et à sa faune. L’immersion sur Glèbe devrait donc lui donner un terreau intéressant à l’expression de son talent. Globalement, la réussite est une nouvelle fois au rendez-vous. Je n’ai eu aucun mal à suivre les aventures dans cet univers plein de surprises. Néanmoins, je ne trouve pas que la magie qui se dégage de Glèbe soit à la hauteur de celle propre à Ythaq. Est-ce de la nostalgie ou un constat objectif ? Je ne sais pas mais le bilan est que je trouve les décors moins travaillés et moins détaillés que dans d’autres opus de la série. Concernant les scènes spatiales, elles sont spectaculaires mais sans originalité. Je trouve dommage qu’il ne donne pas un ton plus personnel à ses grandes batailles interstellaires.
Pour conclure, la qualité de « Le joyau du génie » s’inscrit dans la moyenne de celle de la saga. Il ne s’agit pas d’un de mes meilleurs crus mais il s’avère au-dessus des plus piteux d’entre eux. Le mérite de cet album est de confirmer le retour d’ « Ythaq » à ses sources pour mon plus grand plaisir. Les adeptes auront plaisir à retrouver les héros de l’histoire mais doivent s’attendre que cette dernière connaisse une révolution ou un changement de braquet…