Les dormants est un ouvrage édité chez Cleopas dans la collection Attrape Rêves. Il est l’œuvre de Jonathan Munoz, auteur que je ne connaissais pas jusqu’alors. Il s’agit d’un roman graphique d’une centaine de pages. Il coûte environ dix-neuf euros. C’est un lisant une critique élogieuse dans un magazine que je m’étais décidé à le découvrir. L’article me promettait un voyage enivrant, un programme dans lequel j’avais hâte de me plonger. La couverture est intrigante. Sur un fond blanc, apparait uniquement un regard peu avenant et mystérieux. Il faut entamer la lecture pour savoir à qui appartiennent à ses yeux et pour quelles raisons ils inspirent de la dureté…
La quatrième de couverture est habitée par un curieux texte : « Et si la belle au bois dormant n’avait pas sommeil… Et si c’était les autres… ». Voilà qui nous en indique bien sur ce qu’abrite cet album. Au final, le fil conducteur est relativement simple. Le héros est un homme victime d’insomnies. Il s’avère également être amnésique. Il erre où au hasard des chemins. Il arrive donc au milieu de nulle part où il fait la rencontre d’une jeune fille qui a la capacité d’endormir les gens situés à ses côtés. Elle est donc heureuse de son nouvel ami qui lui permet de se sentir moins seul…
Une grande partie du bouquin a pour objectif de construire une atmosphère quasiment fantastique. Les lieux semblent être coupés du reste du monde. Le héros ne vient de nulle part, ne sait pas qui il est. L’héroïne est pourvue d’un pouvoir soporifique. J’avais le sentiment de me situer dans un conte ou dans une fable. C’est un domaine que j’apprécie particulièrement quand il est habilement exploité. Je vous avoue que Les dormants m’a déçu sur ce plan là. Le fait d’errer dans un endroit quasiment désert et vivant refermé sur lui-même aurait dû faire naitre une ambiance angoissante ou prenante. Ce n’est finalement pas le cas ici. Le travail graphique de l’auteur sur les décors possède pourtant des bases solides pour offrir une épaisseur certaine à l’univers de la trame. Par contre, le style avec lequel les personnages sont dessinés me convient moins et m’empêche de quitter totalement mon statut de lecteur.
L’absence d’intensité dans la lecture résulte aussi d’un scénario finalement assez creux. En découvrant la première partie du livre, j’ai supposé qu’il y était posé les jalons d’une seconde plus rythmée et dense. J’ai donc accepté avec compréhension la présentation relativement lente et diluée des personnages et des lieux. Qui est cet homme ? Qui est cette fille ? Où sont-ils ? Les questions étaient basiques mais j’en espérais des réponses originales et prenantes. Sans vous dévoiler quoi que ce soit, je peux néanmoins vous dire que tout cela accouche d’une souris. Une fois l’ouvrage terminé, je me suis demandé pourquoi l’auteur avait étalé sur cent pages, une intrigue si légère. J’ai attendu désespérément des retournements de situation, des révélations, des scènes marquantes… Rien de tout cela n’est finalement arrivé. Certains moments apparaissent inutiles. L’auteur arrive ponctuellement à exploiter de bonnes idées sur le plan graphique où certaines planches sont envoutantes. Mais l’ensemble reste trop irrégulier et l’intrigue est trop diluée pour me transporter.
Vous l’aurez compris, cet album m’a déçu. Je n’y ai pas retrouvé ce que m’avait laissé espérer l’article qui l’évoquait. Je ne peux pas dire que l’auteur soit dénué de talent mais j’ai le sentiment qu’il n’avait pas les épaules pour mener à bien ce projet relativement ambitieux. En refermant le bouquin, j’ai eu le même sentiment qu’en terminant certains romans qui auraient été bien meilleurs en se réduisant au format d’une nouvelle. En diminuant le nombre de pages de Les dormants, peut-être que l’intensité dramatique aurait été plus intense et ma lecture plus prenante. Mais je ne le saurai jamais…