Critique de Love Addict par CatherinePou
bof, j'avais mal lu le titre donc j'ai été déçuepas mal de sexisme, je sais pas si c'est ironique ou pas mais ça m'a dérangé
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le 2 juil. 2024
Ce tome contient une histoire complète indépendante de toute autre. Il s'agit d'un récit autobiographique, réalisé par Koren Shadmi pour le scénario, les dessins et la mise en couleurs. La première édition date de 2016.
Prologue : K (Koren) et son pote Brian sont chacun assis sur une chaise devant les marches qui mènent à l'entrée de l'immeuble où se trouve leur appartement. C'est l'été : ils ont une demi-douzaine de trucs à vendre, et surtout ils regardent passer les filles. Brian trouve que c'est le paradis, K que c'est un véritable supplice chinois. Brian se lève pour aller chercher à manger, et il demande à K de ne pas vendre son Transformer sans lui. Après son départ, deux copines s'arrêtent et souhaitent savoir combien ils vendent une de leurs chaises. K et elle se mettent d'accord sur 20 dollars. Avant de partir, elle lui laisse sa carte : Michelle Rove, réalisatrice de documentaires. Brian revient et félicite K pour la vente. Un an plus tard, Michelle et K emménage ensemble, et elle apporte la chaise qu'elle avait acheté à K. 6 mois plus tard, l'acrimonie est palpable et ils rompent. C'est l'hiver : K avec son pote Brian et un autre fête son anniversaire au bar Union dans Brooklyn. K explique qu'il est encore sous le coup de sa séparation avec Michelle. Les deux autres lui font observer qu'il y a plein de filles libres dans le bar qui est un lieu de rendez-vous bien connu, qu'il n'a pas à chercher un nouveau grand amour, mais qu'il peut chercher le coup d'un soir. K répond que ce n'est pas son truc, qu'il ne pense pas comme ça. Brian lui fait observer que les femmes ici présentes cherchent exactement la même chose que lui.
De retour dans leur colocation, Brian pousse K de son ordinateur et lui ouvre un compte sur le site de rencontre Lovebug. Puis il réinstalle K devant le clavier et lui intime de compléter son profil. Il lui donne des conseils sur comment remplir en utilisant les statistiques de réussite des profils, sur la photographie à mettre dans son profil. Il ne reste plus qu'à attendre. Le lendemain soir, K n'a eu aucune réponse. Brian lui demande combien de messages il a envoyés : K répond 3. Son copain lui explique qu'il doit en envoyer au moins 60, et tous différents, personnalisés en fonction du profil de la dame. K se lance et en écrit 42 de plus. Il finit par avoir une réponse. Quelques jours plus tard, une femme lui indique qu'elle est au Mamma Bar et qu'il peut venir la rejoindre. Il hésite, Brian l'admoneste en lui disant qu'il doit y aller tout de suite. K répond qu'il arrive dans 15 minutes. Il rentre dans le bar et voit une jolie jeune femme au comptoir en train de descendre une bière. Il l'aborde : c'est bien elle. Il lui demande si elle a apprécié l'exposition sur les vins qu'elle est allée voir. Il sent l'odeur de l'alcool dans l'haleine de son interlocutrice. Elle fait une remarque sur les chaussures de K qu'elle trouve un peu féminine. Ils parlent de la gentrification du quartier. Elle accepte d'aller chez lui, tout en continuant à se montrer un peu sarcastique. Arrivée chez lui, elle lui demande s'il a quelque chose à boire. Ils s'allongent sur le canapé et elle enlève son teeshirt.
Le sous-titre est clair : les confessions d'un dragueur en série. Le lecteur suite K pendant un an de son premier rendez-vous au rendez-vous numéro 75. L'auteur ne montre pas les 75 rendez-vous, mais quand même 24. Le principe du récit est simple : K s'est fait plaquer, son copain l'incite à tester un site de rencontres, et K se prend au jeu, jusqu'à enchaîner les rencontres. Il a peine à croire à la facilité avec laquelle tout ça se passe quand il se rend compte qu'il a réussi à coucher avec 3 femmes différentes en 3 nuits, chose qui ne lui était jamais arrivé. Le titre est également explicite : K va devenir dépendant à ces conquêtes d'un soir, au sexe facile. Le lecteur est donc témoin du comportement d'un individu en proie à une addiction. Pourtant, il n'y pas de leçon de morale, à peine un regard moral sur ces pratiques. K n'est pas un monstre. Il rencontre des jeunes femmes consentantes. Il n'y a pas de rapport de force ou de manipulations malsaines, d'abus de faiblesse, ou de rapport non consenti. Le personnage est bien fait de sa personne, sans être un Apollon. Il choisit des jeunes femmes également bien faites de leur personne, selon ses critères de beauté, avec un fétichisme pour une rencontre (coucher avec une culturiste) mais pas pour les autres. Il n'y a aucune déviance sexuelle, aucune tromperie de part et d'autre sur la nature de la relation recherchée.
Pour raconter son histoire, Koren Shadmi dessine dans un registre réaliste avec un bon niveau de détails. Il représente très régulièrement les lieux où évoluent les personnages, la plupart relevant du quotidien. Le lecteur suit donc K dans des bars, dans son appartement en colocation, à une exposition d'art africain, dans un parc (une erreur tactique), dans un sexshop (une demoiselle un peu fofolle), dans un cinéma, dans un parc avec sa sœur, sur son lieu de travail (un studio d'animation). À chaque fois, il s'agit d'endroits avec des détails particuliers qui rendent les lieux plausibles et uniques. Les personnages se positionnent en fonction des meubles et des accessoires, interagissant avec le décor. Le passage le plus exotique se déroule à Atlantic City pour un week-end avec May, à jouer au Casino et à se promener le long de la plage. L'artiste se concentre sur l'objectif que le lecteur comprenne où se trouvent les personnages, sans passer en mode tourisme avec un luxe de détails qui seraient hors de propos. Il réalise lui-même sa mise en couleurs avec des couleurs douces un peu foncées, apportant plus de matière à chaque surface, sans utiliser d'effets spéciaux propres à l'infographie.
Le dessinateur utilise une approche naturaliste pour les personnages. Il n'exagère pas leur anatomie, ni leurs gestes. Le lecteur remarque qu'il adoucit les traits de leur visage pour les rendre plus expressifs, souvent sympathiques. C'est encore plus vrai pour le visage de K, très épuré, avec des airs qui évoquent parfois Woody Allen jeune. Il n'hésite pas à représenter la nudité y compris de face : il n'y a pas d'hypocrisie visuelle par rapport au sujet du récit. Pourtant les parties de jambes en l'air ne dégagent pas d'érotisme, et n'ont rien de pornographique. Il n'y a pas de gros plan de pénétration, ni sur les organes génitaux. Les rapports sont montrés en une page ou moins et comme étant une occupation tout ce qu'il y a de plus naturelle, quasiment dépourvue de toute charge affective. Cela n'empêche pas K de se montrer toujours respectueux de sa partenaire du soir, et que chacune se comporte de manière différente. Du coup, le lecteur se rend compte qu'il ne sent pas dans une position de voyeur, mais d'observateur d'un moment banal de la vie de K. Il peut admirer des corps féminins différents, il peut comprendre le désir de K, sans pour autant l'éprouver lui-même. C'est un phénomène assez étrange, comme si l'abondance de relations en venait à les rendre insignifiantes sur le plan du désir. Le dessinateur rend admirablement bien compte de la diversité des femmes, de leur individualité, prenant soin de leur attribuer des tenues vestimentaires adaptées aux conditions climatiques et à leur personnalité.
Le lecteur peut s'interroger sur le fait que le personnage principal ne soit appelé que par la lettre K, l'initiale du prénom de l'auteur. Mais rien ne permet de savoir s'il s'agit d'un récit autobiographique plus ou moins fidèle, d'une autofiction ou d'une complète fiction. Le titre et le sous-titre indique que le lecteur va observer un individu devenant dépendant, mais l'auteur ne va pas jusqu'à la déchéance, il ne sort pas de la normalité d'un jeune homme ayant décidé de prendre du bon temps. K profite des bons conseils de son ami Brian qui a plus d'expérience que lui. D'ailleurs tout du long, Brian est un plus gros consommateur que son pote, allant jusqu'à se créer un deuxième profil pour séduire des femmes qui ne seraient pas attirées par son profil initial. En fonction de ses propres convictions morales (et de sa santé), le lecteur se retrouve libre de porter le jugement qu'il veut sur la vie de K, car il n'y a que des adultes consentants. Les femmes ne se comportent pas en victime, ni même en victime consentante, et l'une d'elle utilise le corps de K quasiment comme un objet, uniquement soucieuse de son propre plaisir. Cette vie de bâton de chaise semble bien convenir à Brian, avec finalement peu de mauvaises surprises. Finalement la notion d'addiction reste sous-jacente, et l'auteur donne l'impression de forcer la dose pour le rencart 70, car il conserve un ton léger tout le long du récit. Pour autant, le dénouement ne tombe pas à plat. Il n'y a pas de justice immanente ni de punition morale. Il y a une situation qui met en lumière les limites affectives de relations de ce type.
La couverture semble promettre un récit sulfureux dans le genre : j'étais un accro des sites de rencontre. La lecture s'avère beaucoup plus agréable, dépourvu de côté malsain ou moralisateur. La narration visuelle se fait par des pages à l'ambiance douce, avec des dessins précis sans prétention photographique, et des personnages très incarnés, y compris les conquêtes d'un soir. Il n'y a pas d'hypocrisie visuelle sur le sujet, la nudité étant une évidence au vu du type de récit. Koren Shadmi ne diabolise à aucun moment ni le personnage ni la pratique, et le ton reste amusé, sans condescendance. Le lecteur est libre de se faire son opinion sur ce type de vie.
Créée
le 16 janv. 2021
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