Ce tome fait suite à Broken House of Cards ; c'est le dernier de la série et il peut être lu indépendamment des autres. Il contient les épisodes 24 à 29 qui sont autant d'histoires.


Chacun des 5 premiers épisodes s'articule autour de l'un des 5 sens. En 1963, une jeune fille noire de Harlem souffre de troubles de la vision qui lui font voir des blessures graves sur certains individus. Rosalyne Mays a arrêté les études après le lycée pour travailler comme vendeuse dans un magasin de chaussures pour blanches. Son salaire permet à sa mère de joindre les 2 bouts et d'élever sa plus jeune fille. Malheureusement les troubles de la vision sont tellement intenses que Rosalyne n'est plus en mesure de travailler correctement. Cet épisode sur la vue est illustré par Marley Zarcone.


En 1963, Spencer Wilkins est un publiciste remarquable qui est en passe de devenir un associé dans l'agence qui l'emploie. Mais il se met à entendre des propos délirants en provenance des gens qui l'entourent, que ce soient des clients, son patron, des inconnus dans les transports, ou même son épouse modèle. Cet épisode sur l'ouïe est illustré par Laurenn McCubbin.


À une époque indéterminée au vingtième siècle, Sammy est un petit garçon qui dégage une odeur pestilentielle et qui erre abandonné à New York en vivant d'expédients, et en s'abritant dans une cave abandonnée éclairée par un soupirail. Une dame étrange et menaçante hante ses rêves. Cet épisode sur l'odorat est illustré par Chrissie Zullo.


En 1964, un créateur de mode, écrivain, et artiste accompli bénéficie d'une énigmatique égérie dénommée Blue. Elle est un mannequin exceptionnelle mais elle refuse que qui que ce soit la touche. Cet épisode sur le toucher est illustré par Celia Calle.


En 1966, Carly effectue des études de médecine et entretient un copain qui a arrêté les siennes et qui zone en profitant de la libération des moeurs et du relâchement du contrôle des produits psychotropes. Carly teste un acide ce qui a des conséquences catastrophiques sur son sens du goût (un effet qui évoque fortement la cibopathie de Tony Chew). Cet épisode sur le goût est illustré par Marian Churchland.


Le tome se conclut avec un épisode illustré par Amy Reeder dans lequel Madame Xanadu recrute une apprentie.


Ce tome reflète la volonté de Matt Wagner de collaborer avec des illustratrices différentes pour chaque histoire. Pour chacune de ces dames, il a conçu une histoire indépendante évoquant l'un des 5 sens avec des problématiques différentes et des résolutions qui passent à chaque fois par l'intervention de Nimue (Madame Xanadu). Parmi elles, l'histoire sur le toucher sort du lot. Les illustrations empruntent à la fois à l'esthétique des mangas et aux codes de la mode pour une évocation libre d'Andy Warhol et de Nico. Celia Calle emmène le lecteur dans les milieux branchés peuplés de mannequins filiformes et de codes vestimentaires tendances. La véritable nature de Blue se laisse deviner rapidement, mais sa personnification par le scénario et les flux de pensée est convaincante et envoutante.


Pour les autres épisodes, le pot aux roses se devine plus rapidement et le suspense est assez ténu. Matt Wagner sait faire de chacun des personnages des individus attachant fermement ancrés dans l'époque correspondante. Le trip à l'acide est irrésistible. Coté illustrations, chaque dessinatrice a son propre style. Marley Zarcone utilise un style assez réaliste avec des traits simples et limités pour un résultat efficace et léger. Laurenn McCubbin utilise un style très prononcé à base de trame et de silhouettes qui semblent collées sur le décor, pour un résultat original mais un peu fade. Chrissie Zullo développe un style digne d'illustrations d'un conte pour enfants assez noir, pour un résultat singulier qui fait habilement ressortir la situation anormale de Sammy. Marian Churchland a un style qui évoque celui de Guy Davis, un peu plus léger en encrage et un peu plus plaisant à l'oeil, pour un résultat très féminin.


Amy Reeder illustre le dernier épisode et c'est un vrai plaisir de la retrouver et de constater l'évolution de ses illustrations depuis le premier épisode. Cette histoire est magnifique de bout en bout.


Ce tome clôt la série de "Madame Xanadu" par une brochette d'histoires dont 2 sont exceptionnelles (le toucher, et le dernier), et les autres ont le mérite de tenter autre chose que l'ordinaire des comics pour un pouvoir de divertissement satisfaisant. J'ai pris beaucoup de plaisir à découvrir l'histoire de Nimue, même si tous les récits n'étaient pas exceptionnels. Il s'agit d'une série Vertigo, trop étrange pour pouvoir figurer dans l'univers partagé traditionnel de DC, mais peut être un peu trop sage pour la branche Vertigo.

Presence
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le 17 févr. 2020

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