Il est aveugle mais perçoit le monde comme une source constante d’émerveillement. Elle est voyante mais si fermée que tout n’est que peine et agression à ses yeux. Et quand la seconde heurte le premier, la rencontre entre deux mondes a priori étanches l’un à l’autre accouche d’une histoire des plus charmantes.
Un père ivre quand il ne dort pas, une maison branlante, deux petits boulots pénibles et mal payés : la vie est dure pour Chihaya. Ce qui se ressent cruellement dans son rapport aux autres car la jeune femme possède un sacré répondant, malheureusement teinté d’une bouillonnante amertume. Peu amène, froide et agressive : Chihaya rejette en bloc un monde qu’elle ressent comme injuste et blessant.
À l’inverse, Ichitarô, aveugle, balade gaiement sa canne et explore chaque jour de nouveaux territoires, s’émerveillant de ce que l’existence a à lui offrir. Et quand, par un concours de circonstances, leurs routes se croisent, le jeune homme va tenter d’apprivoiser la farouche jeune femme, véritable écorchée de la vie, en lui montrant comment poser, les yeux fermés, un regard neuf sur le monde.
Sensible et d’une grande finesse, Nos yeux fermés ne se contente pas d’un récit sur le handicap et d’une romance entre deux êtres que tout semble opposer. Akira Sasô transcende cette base pour proposer une belle aventure pleine d’humanité où les caractères se dévoilent peu à peu de manière touchante.
Simple et jolie, voilà une histoire de sentiments à fleur de peau qu’il faut délicatement faire sourdre à la surface de la conscience et des mots. Et la collection "Pika Graphic", relancée l’an dernier, de confirmer la qualité des récits qu’elle propose et de s’affirmer comme une nouvelle valeur sûre de ces romans graphiques en manga à destination d’un lectorat mature.
Chronique originale et illustrée sur ActuaBD.com