Comment trouver les mots justes pour évoquer ce "Tonnerre rampant" ?
Dire que Liberge aurait plus (autant ?) sa place dans une galerie d'art que dans le monde de la BD serait exact mais tellement injuste. Il sait écrire des scénarios et mettre en forme des histoires. Ici la qualité esthétique de l'oeuvre est à ce point aboutie que l'on pourrait facilement oublier ce qu'il a à dire et se contenter d'admirer.
Admirer le travail sur la couleur, lui qui s'est essayé avec bonheur au noir et blanc avec Monsieur Mardi-Gras Descendre. Des couleurs métalliques pour ressortir et appuyer l'atmosphère fantastique.
L'histoire débute dans un monastère en plein milieu du XVIIème siècle dans un coin paumé du royaume de France. De curieuses choses se passent et nous assistons à de mystérieux dialogues entre gens non moins mystérieux. D'ailleurs le ton est donné dès l'avant-propos : Liberge va nous parler du paranormal.
Une planche plus loin, nous sommes en 1928 dans un monastère britannique, hanté depuis des siècles par des entités frappeuses.
Le décor est planté !
Deux mois plus tôt le révérend Pembroke, éreinté par les manifestations de plus en plus fréquentes a fait appel à son ami Mr Squire, spécialiste du domaine.
L'enquête à travers le temps commence !
Les planches composées de cases irrégulières, qui se juxtaposent avec une apparente incohérence sont disposées au contraire de manière à faire ressortir le chaos des esprits,
Sur 68 pages dessinées, plus une dizaine de pages de croquis annotés, Eric Liberge nous fait vivre une expérience à la fois humaine et surnaturelle.
J'ai été personnellement pleinement séduite et je le conseille à tous les amateurs de beau dessin.
Partager les tourments de ses âmes qui réclament justice, lire leurs tourments écrits sur les murs en lettres de douleur, rencontrer ses esprits malheureux et maltraités qui demandent réparation au nom de l'Amour fut une belle expérience.