(critique de toute la saga, sans spoils)
Il aura fallu 15 ans pour que la série s'achève après 124 chapitres (25 tomes en France). Et bah vous savez quoi? C'était extraordinaire! Basé sur une repompe de l'univers D.C, Kirkman (le mec qui a écrit the Walking Dead) a monté une nouvelle franchise de super-héro de son côté, libéré des éditeurs frileux de donner du contenu "adulte" et censurant à tour de bras.
Mais qu'est ce que ça a apporté vraiment au style?
Bein premièrement, de la continuité. Un seul auteur-scénariste tout du long qui travaille sur toute la saga (et ses quelques spin-off, pour le coup un peu moins bon faut l'avouer). Et comme monsieur Kirkman est très très fort pour parler des rapports entres les humains, bah ça nous donne des personnages qui hésitent, qui échouent souvent, qui se remettent en question, qui aiment, qui ont peur, qui rient...d'authentiques humains, avec tout un panel d'émotions (hein Batman!), et présentés dans tout leur contexte social.
Deuxièmement, le rythme. Comme dit plus haut, les rapports entre les gens sont centraux à l'œuvre. On a donc des scènes très intimistes, particulièrement sur la vie du héro Mark Grayson. On a des pages entières où il ne se passe rien, nous présentant un repas de famille avec la télé en fond, ou Mark en train de lire une BD aux chiottes. Mais c'est là qu'on ressent de l'empathie, parce qu'en plus de voir tous les trucs incroyables de héros, on nous montre aussi la partie de l'autre côté du masque, le vrai monde, celui des humains. Quant aux dialogues, ils ne sont pas uniquement là pour faire avancer le récit. Et sur ces scènes, le rythme reste à une échelle que nous, lecteurs, pouvons comprendre. Et du coup, quand une catastrophe survient, ça accélère et on ressent profondément l'écart qu'il y entre les héros et les humains lambda. Ajouté à cela, le monde continue de vivre en dehors de l'histoire, et le retour à la normale n'est jamais absolu.
Et troisièmement les dessins. Nom de dieu de nom de dieu! Je pense que Bryan Ottley (le graphiste principal de la série) devait pratiquer la photosynthèse pour se nourrir vu que pas le temps de niaiser. Les planches qui doivent être réussie le sont TOUTES. Ça fourmille de détails, la mise en case et le cadrage sont juste excellents et il y a un gros travail sur la profondeur et les perspectives qui donnent vraiment l'impression d'être dans un univers en 3 dimensions. Et puisque pas de censure, ça se permet d'être gore. Mais genre c'est abusé tellement c'est gore en vrai, j'ai jamais vu ça ailleurs. Même The Boys peine à suivre. Pour un héro qui s'appelle Invincible, il se fait énormément casser la gueule tout de même! Ça contraste énormément avec les traits assez fins, la colorimétrie et la lumière qui est très présente (toutes les planches sont "éclairées", même de nuit. Rien n'est caché au lecteur), ce qui donne un petit côté cartoon à l'œuvre.
Puis en plus de tout ça, j'adore les personnages. Ils sont tous différents, ont leur propre histoire, leur propre caractère et leur propre évolution...C'est assez varié, ce qui fait que la quantité importante de personnages n'est pas un frein à la compréhension (comme c'est souvent le cas). Ici la diversité est un atout, et c'est assez rare pour le souligner.
Enfin...stop au bla bla. Lisez Invincible! C'est puissant, drôle, émouvant, trash, intelligent, beau, choquant, attendrissant, foutrement excitant...bref c'est très bon. Invincible est un vent de fraicheur dans cet univers qui sent la naphtaline et le réchauffé depuis quelques années, et ça c'est bien.