Âme rouge - Blacksad, tome 3 par Hard_Cover
En 2000, avec Quelque part entre les ombres, Juan Díaz Canales et Juanjo Guarnido entamaient une nouvelle série de bande dessinée. On y faisait la connaissance de Blacksad, détective privé, ancien flic, matou matois et chat charmeur. Un félin noir, sans cesse en butte aux pires aspects de la vie (meurtres, viols, tortures...), faussement détaché des défaillances de la société américaine.
Blacksad, c'est du polar, des enquêtes qui avancent lentement et sûrement. Ou plutôt tranquillement, aussi tranquillement que Blacksad est flegmatique, aussi tranquillement que le serait la partition du blues mélancolique qui pourrait servir de bande originale à cette BD. Mais malin et perspicace, Blacksad trouve toujours le coupable. Les confrontations avec la frange (des quartiers populaires ou de la haute) dégénèrent souvent en scènes de violence.
Mais les aventures de Blacksad se déroulent dans une Amérique florissante des années cinquante, une Amérique toutefois rongée par des maux comme le racisme ou l'anti-communisme. Arctic-nation abordait le thème du premier, transportant le détective dans une petite ville aux mains du Ku Klux Klan. Âme rouge s'intéresse quant à lui à la chasse aux sorcières durant la guerre froide, lorsque le FBI traquait et arrêtait quiconque était suspecté de sympathie communiste.
Dans ce troisième tome de la série, Blacksad retrouve par hasard un de ses vieux amis, Otto Liebber, éminent spécialiste du nucléaire, ayant participé à la conception de l'arme atomique. Mais Liebber est également et surtout l'homme qui a permis au héros d'échapper à un destin de criminel. Or la vie de Liebber est menacée. Blacksad doit trouver pourquoi et par qui. Cela a-t-il un rapport avec le fait que Liebber est un des « douze apôtres », groupe d'artistes et de scientifiques de gauche ? Ou bien l'atomicien a-t-il des secrets inavoués... ?
Comme avec les deux premiers tomes de la série, Juanjo Guarnido émerveille par ses dessins magnifiques, mettant en scènes des animaux humanoïdes charismatiques. Les couleurs, qui sont appliquées à l'aquarelle, donne une légère impression d'ancienneté aux dessins qui convient parfaitement à l'ambiance recherchée : celle d'un film noir à l'atmosphère magnifiquement surannée.
Quant à Juan Díaz Canales, il offre encore une fois un scénario simple, mais qui aborde habilement un point difficile de l'histoire des États-Unis. Il fait aussi progresser le personnage principal, nous en apprenant plus sur son passé, sa personnalité, ses doutes, ses craintes et ses peurs.
Une fois de plus, les deux artistes espagnols démontrent tout leur talent, offrant au lecteur bien plus qu'un moment de détente devant une bonne BD. C'est une immersion totale dans l'univers sombre du polar qu'il va vivre.
Un immanquable !