Slava est une série dont j’ai découvert l’existence en lisant la revue dBD. Il y était proposé une interview intéressante des auteurs. Ils proposaient, à mes yeux, une thématique originale et suffisamment intéressante pour éveiller ma curiosité de lecteur. J’ai également été plutôt séduit par les quelques planches proposées dans le magazine. Assez naturellement, je me suis donc laissé tenter par la lecture du premier tome intitulé Après la chute.
Slava est un jeune artiste qui a vu son destin évoluer suite à la chute de l’Union soviétique. Il s’est maintenant associé à Lavrine pour qui être escroc ou marchand est une même activité. Ce duo improbable visite les vestiges abandonnés du passé pour y trouver des objets, des œuvres d’art, des matériaux ou des machines qui pourraient intéresser du monde sur le marché noir. Leur curieuse routine va prendre un grand virage quand leur route va croiser celle de la ravissante Nina et de son bourru de père Volodia, ouvrier dans une industrie qui s’effondre.
Le quatuor principal se compose de Lavrine, Slava, Nina et Volodia. Le casting est hétéroclite mais ils sont tous liés de manière plus ou moins contrainte. Ils doivent faire du business ensemble mais chacun le fait pour des raisons personnelles et idéologiques différentes. Tout l’album est construit autour de leur collaboration qui semble en permanence tenir sur un fil. La complexité de leurs rapports et les zones d’ombre de chacun font naitre un suspense qui fonctionne très bien. La lecture s’avère prenante et ne souffre d’aucun temps mort.
L’histoire s’inscrit dans la Russie post-soviétique dans une zone isolée aux abords d’une usine abandonnée ou presque. Lavrine voit ces endroits comme un produit à vendre quand les habitants locaux les voient comme le signe que leur vie va s’arrêter. Cette opposition de point de vue et de conception de la vie est au centre de toute la trame. Il y a les exploités et les exploitants dans ce monde qui s’effondre. L’atmosphère qui abrite ces événements est envoutante et assez unique. Le talent de l’auteur pour nous immerger dans ce contexte est à signaler. Le travail sur les décors qu’ils soient extérieurs ou intérieurs est remarquable.
L’auteur cumule dialogues entre les personnages et voix off. La lecture est dense. Les événements sont accompagnés d’explications ou de contextualisation. Il m’a fallu un temps d’adaptation pour accepter cette richesse de texte. J’avais le sentiment qu’elle saccadait ma lecture. Néanmoins, une fois le rythme accepté et maîtrisé, je ne peux qu’avouer que cette démarche enrichit l’histoire et lui offre une atmosphère personnelle. La petite centaine de pages ne souffre d’aucun temps et est dégage une intensité dramatique intéressante.
Au final, cet album est intéressant. La thématique est intéressante et l’immersion réussie. Le dessin possède une vraie personnalité. Le scénario est bien construit. Je trouve les personnages originaux et bien construits. Je suis curieux de connaître la suite de leurs pérégrinations. Le style de narration a créé une petite distance entre l’histoire et moi mais cela n’a gâché en rien le plaisir que m’a offert la lecture…